Par ses cris redoublés, par ses gémissements,
Répandait dans les airs l’horreur de ses tourments.
XV. Travail et Douleur ne sont pas précisément la même chose, quoiqu’ils se ressemblent assez. Travail signifie fonction pénible, soit de l’esprit, soit du corps : Douleur, mouvement incommode, qui se fait dans le corps, et qui est contraire au sens. Quand on coupait les varices à Marius, c’était douleur : quand il conduisait des troupes par un grand chaud, c’était travail. Mais l’un approche de l’autre, eu- l’habitude au travail nous donne de la facilité à supporter la douleur. Et c’est dans cette vue que ceux qui formèrent les républiques de la Grèce, voulurent qu’il y eût de violents exercices pour les jeunes gens. On y oblige a Sparte les femmes même, qui partout ailleurs sont élevées avec une extrême délicatesse, et, pour ainsi dire, a l’ombre.
Mais à Sparte on les voit, dès l’avril de leurs ans,
Braver les injures du temps,
Et chercher dans les jeux une noble poussière.
On leur voit dédaigner la laine, le fuseau,
Et faire leur art le plus beau De la lutte et de la carrière.
XVI. Parlerai-je de nos armées ? Quel travail pour un soldat, lorsqu’il marche, de porter des vivres pour plus de quinze jours ; et de porter outre cela son bagage et un pieu ? À l’égard du casque, du bouclier, et de l’épée, il ne les compte non plus pour un fardeau, que ses épaules, ses bras, ses mains. Un langage usité parmi les soldats, c’est que leurs armes sont leurs membres : et eu effet, si l’occasion se présente, ils mettent bas le reste de leur fardeau, et se servent aussi lestement de leurs armes, que si elles faisaient