Page:Cicéron - Œuvres complètes, Nisard, 1864, tome III.djvu/257

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ment opiniâtreté, d'autres l'appellent constance.

Enfin, les armes ont étouffé les dissensions, et la modération du vainqueur les a toutes anéanties. Il est désormais nécessaire que tous les hommes raisonnables n'aient qu'une seule volonté. César, point de salut pour nous si vous ne vivez, et si vous ne persistez dans les sentiments dont vous avez donné tant de fois, et surtout aujourd'hui, des preuves si éclatantes. Tous ceux qui veulent le salut de l'Etat vous pressent donc et vous conjurent de prendre soin de vos jours ; et, puisque vous croyez avoir quelque péril à craindre, nous vous offrons tous, car c'est au nom de tous que je prends cet engagement, nous vous offrons de veiller autour de votre personne, de vous faire un rempart de nos corps, et de nous jeter au-devant des coups qu'on voudrait vous porter.

XI. Mais je reviens au premier objet de ce discours. César, nous vous présentons les hommages de la plus vive reconnaissance ; les paroles me manquent pour exprimer combien nos cœurs sont pénétrés. Tous les sénateurs ont les mêmes sentiments que moi, et vous avez pu en juger par leurs prières et par leurs larmes. Mais comme il n'est pas nécessaire que tous prennent la parole, ils veulent que je sois leur interprète auprès de vous. Leur volonté m'en fait une loi ; et lorsque Marcellus est rendu au sénat, au peuple romain et à la république, je sens que c'est à moi surtout de remplir ce devoir. En effet, les autres voient dans cette faveur un bienfait qui s'étend sur tous les citoyens ; mais l'amitié qu'on m'a toujours connue pour lui, et qui le cède à peine à celle de C. Marcellus, le plus tendre et le plus sensible des frères, me rend ce bienfait plus précieux encore. Après que je l'ai prouvée par les inquiétudes, les soucis et les chagrins dont mon cœur était affligé tant qu'on a pu douter du sort de Marcellus, il est juste qu'elle éclate aujourd'hui que je suis délivré de ces agitations et de ces alarmes. Ainsi donc, César, recevez les notions de grâces de celui qui, maintenu dans ses anciennes dignités, et revêtu de nouveaux honneurs par votre clémence, à l'instant même où il ne croyait pas que l'on pût rien ajouter à de si nombreuses faveurs répandues sur un seul homme, vous voit, par cette action généreuse, mettre le comble à tant de bienfaits.