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actions par lesquelles ont voit que d’autres se sont procurés ce que l’on désire ; et il arrive ordinairement de là que bien des gens, en prenant pour modèles de grands personnages, se livrent à beaucoup de choses auxquelles ils n’avaient jamais pensé. Lorsque cette émulation a commencé une fois à s’étendre, ses progrès et ses accroissements ont tant d’évidence, qu’il me paraît inutile d’en donner des preuves. Il est constant que les choses qui passent pour les plus grandes ont eu la plupart de très faibles commencements ; mais bientôt l’ardeur d’une noble imitation s’est emparée des esprits, elle a fait sans cesse des progrès, et les objets auxquels elle s’est appliquée ont insensiblement été portés à un tel degré de perfection, qu’on ne saurait plus rien y ajouter. Si les effets de cette généreuse émulation doivent nous charmer et s’ils méritent toute notre reconnaissance dans les choses ordinaires, à plus forte raison devons-nous les remarquer avec plaisir dans l’acquisition et l’affermissement des vertus, d’où dépendent le règlement et la conduite de la vie, qui, quand elle est dirigée sur d’aussi bons principes, produit, dans une abondance incroyable, des fruits de justice, d’intégrité, et s’enrichit des plus purs et des plus honorables sentiments.

On voit donc que c’est avec raison que plusieurs vertus ont été consacrées, puisqu’elles semblent par elles-mêmes mériter un culte, et qu’elles sont pour l’espèce humaine une source inépuisable de biens ; mais je voudrais savoir pourquoi presque tous les animaux reçoivent les mêmes honneurs de la part des Égyptiens. Je pardonnerais encore aux Syriens d’avoir élevé un poisson au rang des dieux pour l’adorer ; ils n’ont ni assez d’esprit, ni assez de connaissances pour