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en voyageant sous le prétexte honteux d’une légation libre(12), que d’être à Rome et de solliciter les suffrages du peuple. De quel éclat, grands dieux ! brille votre autre rival ! Aussi noble que le premier, a-t-il plus de vertu ? Non ; mais plus d’audace. Antoine craint jusqu’à son ombre : Catilina ne craint pas même les lois. Né d’un père ruiné, élevé par une sœur adultère, c’est dans le carnage des citoyens qu’il a fait l’essai de ses forces ; et son premier pas dans les affaires publiques a été le massacre des chevaliers romains. Créé, par Sylla, seul chef de ces Gaulois dont nous garderons longtemps le souvenir, et qui égorgèrent alors les Titinius, les Nannius, les Tanusius, ce fut au milieu d’eux qu’il assassina, de ses propres mains, le mari de sa sœur, Q. Cécilius, chevalier romain, homme irréprochable, étranger à tous les partis, dévoué en tout temps au repos par son caractère, et alors surtout par sa vieillesse.


III. Dirai-je que cet homme qui vous dispute le consulat est le même qui, aux yeux du peuple, promena par toute la ville, en le battant de verges, M. Marius, le citoyen le plus chéri du peuple ; qui le traîna au monument de Catulus(13), l’y déchira par les plus affreux supplices ; qui, saisissant d’une main les cheveux de l’infortuné encore palpitant(14), lui trancha la tête de l’autre, et porta en triomphe cette tête, qui inondait ses doigts de ruisseaux de sang ? le même qui, depuis, a toujours vécu parmi des histrions et des gladiateurs, ministres les uns de ses débauches, les autres de ses forfaits ; qui ne s’est jamais approché des lieux les plus saints, les plus vénérables, que sa perversité n’y fît naître quelque soupçon d’infamie, lors même qu’il ne s’y trouvait pas d’autre coupable que lui(15) ? le même qui choisit pour amis, dans le sénat, des Curius et des