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ainsi qu’au temps de nos ancêtres, cette province fut comme l’échelon qui les conduisit à la domination de l’Afrique ; car la puissance colossale de Carthage ne serait pas si facilement tombée, si les Siciliens n’avaient pas toujours mis à notre disposition les ressources de leurs moissons, et les abris de leurs ports.

II. Voilà pourquoi P. Scipion l’Africain, après la ruine de Carthage, orna les villes de la Sicile de tant d’admirables statues et de somptueux monuments : il voulut que ceux à qui la victoire du peuple romain avait inspiré le plus de joie possédassent dans leurs murs les plus beaux trophées de cette victoire. Voilà pourquoi enfin M. Marcellus lui-même, qui, en Sicile, fit sentir sa valeur aux ennemis, sa clémence aux vaincus, sa bienveillance à tous les Siciliens, sut non-seulement dans cette guerre ménager nos alliés, mais épargner même les ennemis qu’avaient domptés ses armes. Cette ville superbe, Syracuse, si bien défendue par l’art et par la nature, si bien fermée du côté de la terre et de la mer, ayant cédé à sa valeur et à son génie, non-seulement il ne voulut pas qu’elle souffrît aucun dommage, mais il la laissa si magnifiquement décorée, qu’elle devint tout à la fois un monument de ses victoires, de sa clémence, de son désintéressement, quand on considérait et quels remparts il avait forcés, et quel peuple il avait épargné, et quelles richesses il avait respectées. IL se crut obligé à tant d’égards envers la Sicile, qu’il ne se permit pas. de faire dispa-