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et à rétablir l’ordre que la violence et la corruption du temps avaient interrompu. Elles augmentaient l’autorité du sénat, tempéraient le pouvoir du peuple, et réglaient celui des tribuns.

VI. Municeps Amerinus…. Les villes municipales étaient celles qui avaient obtenu en tout ou en partie les prérogatives dont jouissaient les citoyens romains. Les unes avaient reçu le droit de cité, mais sans qu’on leur eût accordé le droit de suffrage, ni la faculté de parvenir aux magistratures, ni même quelquefois la liberté de contracter mariage avec des femmes romaines. Les autres participèrent à tous les droits attachés à la qualité de citoyens ; mais les habitants de ces villes ne pouvaient prendre le titre de citoyen romain, qu’après s’être établis à Rome, et s’être fait inscrire dans une tribu. Cette inégalité de traitement et ces distinctions entre les villes de l’Italie disparurent à la fin de la guerre Sociale, l’an 663. Le droit de cité fut accordé sans restriction à l’Italie entière, et tous ses habitants furent inscrits sur les rôles des citoyens.

Ibid. Cum proscriberentur homines. Sylla fut l’inventeur des proscriptions : Primas ille, et ulinam ultimus, exemplum proscriptionis invenit. (Vell. Paterculus, II, 28. ) La proscription se faisait en affichant dans la place publique les noms de ceux dont il ordonnait la mort, avec promesse d’une récompense à quiconque apporterait leurs têtes. Marins et Cinna avaient, comme lui, exercé d’affreuses vengeances ; mais ce n’avait pas été proprement par la voie de la proscription, ni en proposant une récompense aux meurtriers.

Il fit périr ainsi quinze consulaires, quatre-vingt-dix sénateurs, deux mille six cents chevaliers.

VII. Post horam primam noctis. Chez les Romains, le jour naturel, c’est-à-dire le temps de la présence du soleil sur l’horizon, était divisé en douze portions ou en douze heures. Les jours étant inégaux, ces heures devenaient inégales comme eux dans les différents temps de l’année ; elles étaient plus longues l’été que l’hiver.

On comptait la première heure du jour au lever du soleil, et la première de la nuit au coucher de cet astre.

Roscius fut tué vers l’équinoxe de septembre, l’an de Rome 672. À cette époque les jours et les nuits sont divisés en douze parties égales. Ainsi, après la première heure, de la nuit, signifie, selon notre manière de compter, entre sept et huit heures du soir.

Le pas romain, composé de cinq pieds, revient à quatre pieds de roi, six pouces, cinq lignes. Le mille sera de 756 toises, et 26 milles donneront 10 lieues de 2,500 toises. Cette diligence de Glaucia est digne de remarque, et suppose quelque motif pressant. Il n’y avait point de poste chez les Romains, et leurs voitures de voyage étaient moins légères que les nôtres. Ils ne pouvaient pas voyager aussi rapidement que nous.

Ils entendaient par cisium un chariot à deux roues, dont ils se servaient pour les courses promptes.

Ibid. In castra L. Sullæ Volaterras defertur. Sylla était occupé a réduire Volterra, ville d’Étrurie, où s’étaient réfugiés plusieurs partisans de Marius, qui soutinrent un siège de trois ans.

IX. Decretum decurionum. Les villes municipales se gouvernaient suivant leurs lois particulières ; elles avaient leurs propriétés, leur justice et leur administration. Les sénateurs de ces villes étaient appelés décurions, et le sénat, collège des décurions. Le nom de décurions leur avait été donné, suivant les commentateurs, parce que dans les premiers temps, lorsqu’on établissait une colonie, on choisissait le dixième des nouveaux citoyens pour former le conseil public. Les premiers magistrats étaient nommés ou dictateurs, ou préteurs, ou édiles, duumvirs, quatuorvirs.

Ibid. T. Roscius Capito in legatis erat. On est étonné de voir que Capiton fasse partie de la députation envoyée à Sylla ; mais il faut observer que Capiton était un des premiers décurions, et qu’il est très-probable que ses nouvelles liaisons avec Chrysogonus, et le don qu’il en avait reçu, n’étaient pas encore parvenus à la connaissance des magistrats d’Amérie.

X. Et sese ad Cæciliam contatit. Cécilia Métella, fille de Q. Cécilius Métellus Népos, était femme de Sylla, qui eut toujours pour elle les plus grands égards. Ce fut à cette généreuse protectrice que le jeune Roscius dut là liberté qui lui fut accordée de se défendre en justice, et de pouvoir échapper aux poursuites de Chysogonus, favori du dictateur.

XI. Supplicium parricidarum. Le parricide était cousu dans un sac de cuir. On renfermait avec lui une vipère, un chien, un singe et un coq. Ie sac était enduit de poix et de bitume, ensuite on le jetait dans le Tibre ou dans la mer. Le premier qui subit ce supplice fut Publicius Malléolus, qui, l’an 652 de Rome, tua sa mère, aidé de ses esclaves. Ce fait eut lieu vingt et un ans avant l’époque où Cicéron défendit Roscius.

XIX. Lex Remmia. L’auteur et l’époque de cette loi sont également inconnus. Il est probable qu’elle fut portée peu de temps après la fin des proscriptions. Les confiscations de Sylla avaient réveillé la cupidité de mille calomniateurs qui intentaient des procès à des citoyens innocents, afin de les dépouiller de leurs biens : on voulut faire cesser cet abus ; et la loi Remmia ordonna que les auteurs d’une accusation calomnieuse subiraient la peine du talion et l’infamie. On leur imprimait sur le front la lettre K, initiale du mot calumnia, qui anciennement s’écrivait par un K.

XX. Cibaria vobis prœberi videmus. La loi accordait aux accusateurs le quart de l’amende ou de la confiscation prononcée contre les condamnés ; ce qui les avait fait nommer quadruplatores. Du temps des Césars, ces gens furent nommés délateurs.

XXVI …ita moriuntur, ut eorum ossa terra non tangat : ita jactantur fluctibus, ut nunquam abluantur : ita postremo ejiciuntur, ut ne ad saxa quidem mortui quiescant. Ce passage fut reçu avec les plus vives acclamations. Mais voyons quel jugement en a porté Cicéron lui-même, dans un âge plus avancé : Quantis illa clamoribus adolescentuli diximus de supplicio parricidarum ! quae nequaquam satis deferbuisse post aliquanto sentire cæpimus… Sunt enim omnia, sicut adolescentis, non tam re et maturitate, quam spe et exspectatione laudati. (Orator., cap. 30 ) — « Quels applaudissements accueillirent dans ma jeunesse cette peinture du supplice des parricides, où je ne tardai pas à blâmer moi-même l’effervescence d’un jeune orateur ! … « Tout ce passage est d’un jeune homme, et l’on applaudit l’orateur moins à cause de ce qu’il était déjà, qu’à cause de ce qu’il semblait promettre. » Traduction de M. Le Clerc. En effet, il était question de défendre un fils accusé de parricide. Était-ce le moment de s’amuser à un vain jeu d’esprit et de symétriser des antithèses ?

XXIX. Fateor, me sectorem esse. On entendait par le mot sectores ceux qui se rendaient adjudicataires des biens des proscrits ou des condamnés. Ces hommes formaient des compagnies. Ils se faisaient adjuger à vil prix les dépouilles de ces malheureux, qu’ils revendaient en détail, compensant ainsi par d’énormes profits l’ignominie de ce honteux commerce.

Sector vient du vieux mot latin secari, pour sequi, être à la suite, à l’affût de ces ventes. Mais le mot homonyme sector vient de secare, couper. C’est sur celle double signification que se fonde le jeu de mots : Nescimus, per ista tempora, eosdem fere sectores fuisse collorum et bonorum ? Notre langue ne nous permet pas de rendre ce double sens par un seul et même mot.