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NOTES

que vers l’an 454 de Rome, un certain Ticinius Ména fit venir des barbiers de Sicile, et introduisit le premier à Rome l’usage de se raser. On faisait ordinairement sa barbe à vingt et un ans. Auguste ne commença qu’à vingt-cinq ans. (Dion, XLVIII, 34.) On voit dans Cicéron, pro Cælio, chap. 14, que certains jeunes gens qui avaient déjà de la barbe, et ne se faisaient pas encore raser, la peignaient et l’arrangeaient avec un soin recherché : « Aliquis mihi ab inferis excitandus est ex barbatis illis, non hac barbula, qua isti delectantur, sed illa horrida, quam in statuis antiquis et imaginibus videmus. » Et dans une lettre à Atticus, i, 14 : « Concursabant barbatuli juvenes, totus ille grex Catilinæ. » Ces mots, bene barbatos, ne signifient donc pas, comme l’a pensé Clément, rasés avec soin. — Manicatis et talaribus tunicis. La tunique était un vêtement de laine qui se mettait sous la toge. Aulu-Gelle, l. c., dit qu’il était honteux pour un homme de porter une tunique à manches, et qui descendît jusqu’aux pieds. — Velis amictos, non togis. L’orateur veut dire que les tissus dont sont faites leurs toges conviendraient mieux par leur finesse à faire des voiles pour les femmes.

X. Antelucanis cænis. Il y a dans ces mots une intention ironique. Antelucana industria signifie l’activité d’un homme qui, avant le jour, est déjà au travail. Et eux aussi, avant le lever de la lumière, ils veillent déjà ; mais c’est parce que leurs festins, ou plutôt leurs débauches, se sont prolongés toute la nuit.


LIVRE TROISIÈME.

Pontem Mulvium. « Le pont Milvius, aujourd’hui Ponte-Mole, fut bâti sur le Tibre, à un mille de Rome, du côté par où on y arrive de Toscane, par les soins de M. Émilius Scaurus. J’observai sur place que ce lieu était fort propre à dresser une embuscade, à cause des chemins creux par où ou y aborde. C’est au passage de ce pont que Constantin défit le tyran Maxence. » (Le président de Brosses, Histoire de la Républ. rom.) — L. Elaccus est celui pour qui Cicéron, quatre ans après, fit un plaidoyer que nous avons, et dans lequel il parle des services que Flaccus avait rendus en cette occasion. À l’égard de Pomtinius, que d’autres nomment Pontinius ou Pomtinus, c’est le même qui, dans la suite fut un des lieutenants de Cicéron en Cilicie. (D’Olivet.)

II. Ex præfectura Reatina. Réate, maintenant Riéti, à 15 lieues N. E. de Rome, sur les confins de l’Abruzze. On appelait préfectures les villes qui, chaque année, recevaient de Rome des préfets pour administrer la justice. Moins favorisées que les colonies et les villes municipales, leur état politique dépendait du sénat romain, et leurs droits civils des édits des préfets.

IV. Cinnam ante se et Sullam. Lentulus, ainsi que Cinna et Sylla, était de l’illustre maison Cornélia. Or, le prétendu livre sibyllin portait que CCC. régneraient successivement à Rome, et ces lettres initiales s’appliquaient fort naturellement à trois Cornélius.

Port virginum absolutionem. La vestale Fabia fut accusée d’avoir violé son vœu de chasteté. Le séducteur, disait-on, était Catilina. Elle fut absoute, parce qu’elle était sœur de Térentia, femme de Cicéron. (Asconius.) C’est le fameux Clodius qui l’avait appelée en justice. Il avait même impliqué plusieurs autres vestales dans son accusation. Pison fit pour elles un plaidoyer admirable. (Cic. Brut., 68) Caton lui-même, soit qu’il crût la vestale innocente, soit qu’il entrevît quelque mauvais dessein dans la conduite de l’accusateur, fit à Clodius si grande honte de son procédé, qu’il le contraignit à sortir de la ville. Puis, lorsque Cicéron vint l’en remercier, il lui repartit, que c’était à la république qu’il en fallait rendre grâce, puisqu’il n’avait qu’elle en vue dans toutes ses actions. (Le président de Brosses.)

IX. Capitolii autem incensionem. L’an de Rome 670, sous les consuls Scipion et Norbanus, le Capitole, bâti quatre cents ans auparavant par les rois, fut consumé par un incendie dont il fut impossible de découvrir la cause. (Appien, Guerres civ., I, 83.)

Linum incidimus. Quand la lettre était pliée, on passait de part en part un fil dont on arrêtait les deux bouts avec de la cire sur laquelle on imprimait son cachet. Il n’y a pas soixante ans, dit l’abbé d’Olivet, que c’était encore l’usage en France, surtout pour les personnes de la cour.

V. Imago avi tui. P. Lentulus, consulaire, prince du sénat, et qui, dans le mouvement où périt C. Gracchus, avait été blessé en combattant pour le parti de la noblesse.

VI. Qui hujus conjurationis participes fuissent. Il ne faut pas oublier que le consul C. Antonius était ami de Catilina, et que peut-être il serait entré dans la conjuration, si son collègue ne l’eût acheté à la bonne cause en lui cédant ses droits au gouvernement de la Macédoine : Collegam suum Antonium pactione provinciæ perpulerat, ne contra rempublicam sentiret. (Salluste, chap. 26.) Le président de Brosses compare les remercîments que le sénat lui adresse en cette occasion à ceux qu’il fit au consul Térentius Varron après la défaite de Cannes. C’est par un trait de la même sagesse qu’il remit des conjurés à la garde de César et de Crassus, soupçonnés l’un et l’autre de n’être pas étrangers, au moins par leurs vœux, à la conjuration.

VIII. Quum aruspices ex tota Etruria, etc. « On racontait qu’on avait vu des apparitions de spectres, des vols d’oiseaux inconnus ou de mauvais augure ; qu’on avait senti en divers lieux des tremblements de terre ; qu’il avait paru dans le ciel des feux épouvantables du côté de l’occident (des aurores boréales) ; que M. Hérennius, magistrat d’une ville de Campanie, avait été tué d’un coup de foudre sans qu’il y eût alors aucun nuage dans l’air. Il est certain que peu auparavant le tonnerre était tombé sur le Capitole, où il avait abattu une partie du bâtiment, renversé la statue de Jupiter, brisé celle de Pinarius Natta, fondu les tables d’airain, où les lois étaient gravées, et frappé un groupe de bronze représentant la louve qui allaite Rémus et Romulus. Ce groupe est encore au Capitole, où il fut placé, il y a vingt et un siècles, par les deux Ogulnius, édiles curules, l’an de Rome 457. Ils employèrent l’argent des amendes à faire jeter en bronze ce monument. On le voit aujourd’hui dans le même état où la foudre le mit alors. J’y ai remarqué, avec curiosité et satisfaction, le coup de tonnerre qui glisse le long des côtes, et a fondu une partie de la cuisse. » (Le président de Brosses.) Quelques antiquaires pensent que ce groupe n’est qu’une copie de l’ancien.

X. P. Sulpicium. Sulpicius, après avoir contribué à faire nommer Sylla consul en 665, se déclara contre lui, et voulut lui ôter le commandement de la guerre contre Mithridate. Sylla marche aussitôt contre Rome avec son armée, prend la ville, chasse Marius, le fait déclarer ennemi public, ainsi que Marius le fils, Sulpicius, et neuf autres sénateurs.

Ex urbe collegam sman expulit. Pendant que Sylla remportait des victoires sur Mithridate, la guerre s’était renouvelée entre son parti et celui de Marius qui avait pour chef Cinna, l’un des consuls de 666. Octavius, l’autre consul, chassa celui-ci de Rome dans une sédition,