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mains du sénateur Q. Sergius, condamné depuis comme assassin, qui le retint en esclavage. Numérius Aurius mourut, et laissa pour héritier son autre frère, Cnéus Magius. Magia, femme d’Oppianicus, mourut ensuite. Enfin, le dernier fils qui restait à Dinéa, Cnéus Magius, mourut à son tour. Il institua héritier le fils de sa sœur, le jeune Oppianicus, que vous voyez ici, et voulut qu’il partageât avec sa mère Dinéa. Sur ces entrefaites, arrive chez Dinéa une personne qui lui annonce, de manière à ne laisser ni équivoque ni incertitude, que son fils Marcus Aurius est vivant, et qu’il est retenu en servitude dans la Gaule. Cette femme, privée de tous ses enfants, et qui entrevoit l’espérance d’en retrouver un, assemble tous ses parents, tous les amis de son fils, et les conjure, les larmes aux yeux, de l’aider de leur secours, d’aller à la recherche du jeune homme, et de rendre à une mère le seul fils que la fortune jalouse ne lui ait pas ravi. Tandis qu’elle est occupée de ce soin, une maladie violente la saisit tout à coup. Elle lègue par testament un million de sesterces à ce fils qu’elle cherche, et institue héritier le jeune Oppianicus, son petit-fils. Peu de jours après, elle n’était plus. Cependant ses parents, fidèles, après sa mort, à la promesse qu’ils lui avaient faite de son vivant, vont en Gaule à la recherche d’Aurius, accompagnés de celui même qui avait attesté son existence.

VIII. Mais Oppianicus, dont plus d’un forfait vous révélera l’audace et la scélératesse sans exemple, corrompt d’abord cet homme par le moyen d’un Gaulois, son ami ; ensuite, pour une somme assez modique, il trouve un assassin qui le débarrasse d’Aurius lui-même. Ceux qui étaient partis à la recherche de cet infortuné écrivent à sa famille qu’ils éprouveraient à le découvrir les plus grandes difficultés, parce qu’ils s’étaient aperçus que leur guide avait été corrompu par Oppianicus. Aulus Aurius, homme de tête et d’expérience, considéré dans sa patrie, parent de M. Aurius, lut leur lettre sur la place publique, en présence d’une multitude d’auditeurs et d’Oppianicus lui-même, et protesta hautement qu’il appellerait Oppianicus en justice, s’il apprenait que Marcus Aurius eût été tué. Au bout de quelque temps, les voyageurs reviennent à Larinum, et annoncent l’assassinat de Marcus. Cette nouvelle excita, non seulement dans sa famille, mais dans la ville tout entière, un sentiment profond d’indignation contre Oppianicus, de pitié pour sa victime. Aulus Aurius, qui s’était déjà prononcé avec tant de force, éclatant alors contre l’auteur du crime en menaces et en invectives, celui-ci prend le parti de fuir, et se rend dans le camp de l’illustre Quintus Métellus. Depuis cette fuite, témoin irrécusable de son crime et de ses remords, il n’osa plus se confier à la justice et aux lois, ni se présenter sans armes devant ses ennemis. Mais au moment de la victoire de Sylla, il accourt avec une troupe de gens armés, et entre à Larinum au milieu de la consternation générale. Il se défait des quatre magistrats choisis par les habitants ; déclare que lui-même, avec trois autres, est nommé par Sylla, pour les remplacer ; ajoute que le même Sylla lui a donné