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vent être regardées comme les lois du peuple et du sénat.

Les habitants d’Halèse, pour prix de nombreux et importants services rendus à la république par eux et par leurs ancêtres, ont naguère, sous le consulat de L. Licinius et de Q. Mucius, à l’occasion de différends qui les divisaient pour l’élection de leurs sénateurs, demandé librement des lois à notre sénat. Le sénat décréta, par un sénatus-consulte, rédigé en termes honorables, que le préteur C. Claudius Pulcher, fils d’Appius, leur donnerait des lois sur l’élection des sénateurs. C. Claudius, après avoir consulté tous les Marcellus alors présents, donna, d’après leurs avis, des lois aux Halésiens. Il y régla un grand nombre de points : sur l’âge des personnes, qu’il ne fallait pas avoir moins de trente ans ; sur le négoce, que celui qui s’y serait livré ne pourrait être élu ; sur le cens, et sur d’autres objets. Toutes ces dispositions, avant la préture de Verrès, ont été maintenues par l’autorité de nos magistrats, d’accord avec la libre volonté des Halésiens. Sous sa préture, tout crieur public a, s’il l’a voulu, acquis à prix d’argent son entrée dans cet ordre ; des jeunes gens de seize ou dix-sept ans ont acheté le titre de sénateur ; et, ce que les Halésiens, nos anciens et fidèles alliés et amis, avaient obtenu à Rome qu’on interdit même à leurs suffrages, est devenu possible à l’argent sous Verrès.

L. Les Agrigentins ont, pour l’élection de leurs sénateurs, d’anciennes lois de Scipion qui prescrivent les mêmes dispositions ; et de plus, comme il y a deux classes d’Agrigentins, l’une des anciens colons, l’autre de ceux qu’en vertu d’un sénatus-consulte, le préteur C. Manlius transporta des villes de Sicile dans Agrigente, les lois de Scipion ont réglé qu’il n’y aurait pas dans le sénat plus de nouveaux colons que d’anciens Agrigentins. Verrès qui, en les mettant à prix, avait nivelé tous les droits, qui, au moyen de l’argent, avait fait disparaître toutes les distinctions d’état et toutes les différences, ne confondit pas seulement ce qui concernait l’âge, la naissance, le négoce ; mais encore, pour ces deux espèces de citoyens, il bouleversa l’ordre et le choix des anciens et des nouveaux. Il était mort un sénateur parmi les anciens, et il restait de part et d’autre un nombre égal ; il fallait nécessairement choisir un des anciens en vertu des lois, pour que ceux-ci fussent en majorité. Dans cet état de choses, il se présente à Verrès, pour acheter cette place vacante, des citoyens anciens et nouveaux. À force d’argent, un nouveau l’emporte et obtient une lettre du préteur. Les Agrigentins lui envoient des députés pour l’instruire des lois et lui rappeler l’usage constamment suivi jusque-là : ils voulaient lui faire comprendre qu’il vendait la place à un homme n’ayant pas même qualité pour l’acheter. Verrès, qui avait déjà reçu le prix, ne fut pas le moins du monde ému de leurs discours. Il tint la même conduite à Héraclée : en effet, là aussi Rupilius a conduit une colonie, et porté des lois semblables sur l’élection des sénateurs, et le nombre des anciens et des nouveaux. Verrès ne se contenta pas, comme chez les autres peuples, de recevoir de l’argent ; il confondit encore les classes et le nombre des anciens et des nouveaux.

LI. N’attendez pas que je parcoure toutes les villes : je comprends tout dans ces seuls mots :