Page:Cicéron - Œuvres complètes, Garnier, 1850, tome 2.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tellus, puisque c’est lui qui doit présider le tribunal. Ainsi après les calendes de janvier, le préteur et presque tout le tribunal étant changés, nous éluderons à notre gré, et comme il nous plaira, les menaces de l’accusateur, et cette grande attente où l’on est du jugement. Nous sommes aujourd’hui aux nones de sextilis ; vous avez commencé à vous assembler à la neuvième heure ; eh bien ! ce jour, ils ne le comptent même pas. Il y a dix jours d’ici aux jeux votifs que doit célébrer Cn. Pompée ; ces jeux emporteront la quinzaine ; puis viendront immédiatement les jeux romains. Ainsi ce n’est qu’après quarante jours d’intervalle environ, qu’ils pensent devoir répondre à ce que nous aurons dit ; encore se flattent-ils de réussir, soit en plaidant, soit en faisant remettre la cause sous différents prétextes, à traîner l’affaire en longueur jusqu’aux jeux de la victoire. Ces jeux touchent aux jeux plébéiens, après lesquels il ne reste que fort peu de jours d’audience. Et de cette manière, l’accusation étant refroidie, la cause arrivera tout entière devant le préteur Métellus. Quant à ce préteur, si j’avais eu quelque défiance de sa probité, je ne l’aurais pas conservé au nombre des juges ; toutefois, dans les dispositions où je me trouve, j’aime mieux qu’il prononce comme juge dans cette affaire que comme préteur, et lui confier sa tablette sous la foi du serment, que celle des autres sans lui demander son serment.

XI. Maintenant, juges, je vous le demande ; que dois-je faire ? car le conseil que vous me donnerez, même tacitement, sera, j’en suis certain, celui que je me croirai obligé de suivre. Si j’emploie à plaider le temps que la loi m’accorde, je recueillerai le fruit de mes travaux, de mon activité et de mon zèle ; et peut-être, mon accusation montrera-t-elle que jamais accusateur ne s’est présenté mieux armé, plus vigilant, mieux préparé. Mais tandis que je mériterai cette gloire, fruit de mes efforts, il est bien à craindre que l’accusé ne m’échappe. Quel parti puis-je donc prendre ? ce parti n’est, selon moi, ni obscur, ni caché. Cette gloire qui pourrait être la récompense d’une longue suite de discours, réservons-la pour d’autres temps : quant à présent, accusons cet homme avec des pièces, des témoins, des actes et des autorités privés et publics. Dans tout cela, c’est à vous que j’aurai affaire, Hortensius. Je le dis ouvertement : si je pensais que votre dessein fût, dans cette cause, de lutter contre moi par la parole et en réfutant mes preuves, moi aussi je donnerais tous mes soins à l’accusation, et au développement des griefs que j’impute à Verrès mais, puisque vous êtes décidé à me combattre bien moins d’après votre caractère, que d’après le danger et le besoin de l’accusé, il faudra bien se défendre par quelque moyen contre cette conduite insidieuse. Votre plan est de ne commencer à me répondre qu’après les deux fêtes ; le mien, d’obtenir la seconde audience avant les premiers jeux : ainsi, on pourra voir que vous agissez avec astuce ; moi, je ne consulte que la nécessité.

XII. J’ai dit que la lutte était engagée entre nous deux, je m’explique. Lorsque, à la prière des Siciliens, je me suis chargé de cette cause, considérant quelle gloire c’était pour moi que ces peuples voulussent avoir des preuves de mon zèle et de ma fidélité, après en avoir eu de mon intégrité et de mon désintéressement, cette tâche, une fois entreprise, je m’en proposai une plus grande