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il se laissa persuader, les soldats et tous les Juifs. Mais il ne faut pas s’étonner que des soldats se soient laissé gagner par de l’argent, puisqu’un des disciples du Sauveur l’a vendu pour un peu d’argent. « Les soldats ayant reçu l’argent firent ce qu’on leur avait dit ; et ce bruit qu’ils firent courir est commun encore aujourd’hui parmi les Juifs (15) ». J’admire encore ici la sincérité des Évangélistes qui ne rougissent point de dire cela, et d’avouer que ce faux bruit a prévalu contre toutes leurs prédications et s’est confirmé de plus en plus par la succession des temps parmi les Juifs. « Or, les onze disciples s’en allèrent en Galilée sur la montagne où Jésus leur avait commandé de se trouver. Et le voyant ils l’adorèrent. Quelques-uns aussi furent dans le doute (16) ». Il me semble que ce fut ici la dernière apparition de Jésus-Christ qui arriva en Galilée, lorsque Jésus-Christ envoya ses apôtres dans tout l’univers pour convertir et pour baptiser les hommes. Et je vous prie encore d’admirer ici la véracité des Évangélistes qui ne cachent rien de tous les défauts que les apôtres firent paraître jusqu’au dernier jour. Mais si quelques-uns étaient dans le doute, cette dernière apparition les rassura et les confirma entièrement.

Que leur dit donc Jésus-Christ, lorsqu’il les vit assemblés ? « Et Jésus s’approchant leur dit : Toute puissance m’a été donnée dans le ciel et sur la terre (17) ». Il leur parle encore en quelque sorte humainement, parce qu’ils n’avaient pas reçu le Saint-Esprit qui devait élever leurs âmes : « Allez donc et instruisez tous les « peuples, les baptisant au nom du Père, du e Fils, et du Saint-Esprit, et leur apprenant à observer toutes les choses que je vous ai commandées (18) ». Ce qu’il entend et des maximes de la foi et des règles de la morale. Il ne leur dit pas un seul mot des Juifs, et il ne leur parle point de tout ce que ce peuple venait de faire contre sa personne. Il ne reproche point non plus à saint Pierre son triple renoncement ; il ne se plaint point de la fuite et de l’abandonnement des autres. Il leur commande seulement d’aller dans tout le monde, et il leur donne en abrégé toute la doctrine qu’ils doivent prêcher, en baptisant les hommes, en leur disant : « Qu’ils leur apprennent à observer toutes les choses qu’il leur a commandées », et pour rassurer leurs esprits dans la frayeur que ces grands commandements leur pouvaient causer, il ajoute ces paroles : « Et voilà, je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles (19) ». Considérez encore ici, mes frères, la grandeur et la souveraine puissance du Fils de Dieu. Voyez aussi comment, en parlant à ses apôtres, il continue de condescendre à leur faiblesse. Il proteste qu’il sera lui-même toujours non seulement avec eux, mais encore avec tous ceux qui doivent croire un jour en lui. Les apôtres ne devaient pas vivre jusques à la fin du monde, et c’est visiblement à tous les fidèles qu’il parle, qu’il regarde comme un seul corps. Ne m’objectez donc point, leur dit-il, la difficulté des choses que je vous ordonne, parce que je suis avec vous, et que je vous rendrai tout facile. C’est la parole et la promesse dont il rassurait aussi autrefois ses prophètes, et on voit qu’il dit à Jérémie, qui lui représentait son enfance, à Moïse et à Ézéchiel, qui hésitaient à suivre ses ordres : « Je vous assure que je suis avec vous ».

Mais quelle différence voyons-nous ici entre les apôtres et les prophètes ? Les prophètes s’excusent, lorsqu’on ne les envoie prêcher qu’à un seul peuple, et les apôtres, ne font point ces difficultés, lorsqu’on les envoie dans tout l’univers. Il leur parle, et il les fait à dessein souvenir de la fin du monde et « de la « consommation des siècles », afin de les attirer à lui, et de les empêcher de considérer seulement les maux qu’ils souffriraient sur la terre, mais de penser encore aux biens du ciel. Il semble qu’il leur dise par cette parole : Les maux dont vous serez affligés se termineront dans cette vie, puisque le monde même verra sa fin ; mais les biens dont je vous ferai jouir ensuite seront éternels, comme je vous l’ai déjà souvent promis. Ainsi, après les avoir fortifiés et rassurés par cette promesse, et leur avoir rappelé dans l’esprit ce dernier jour, il les quitte et il se retire dans le ciel. Ce jour est sans doute l’objet des vœux de tous les bons, comme il est le sujet de la crainte et de la terreur de tous les méchants, parce qu’ils y entendront l’arrêt éternel et irrévocable de leur condamnation. Mais ne nous contentons pas, mes frères, de regarder ce jour avec frayeur. Préparons-nous-y pendant que nous en avons le temps, en réglant toute notre vie, et en renonçant à tous nos désordres. Nous le pouvons si nous le voulons. Car si tant de personnes l’ont fait avant la grâce du Sauveur et de l’Évangile,