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HOMÉLIE LXXXVII.


« LES SOLDATS DU GOUVERNEUR MENÈRENT JÉSUS DANS LE PRÉTOIRE, ET TOUTE LA COHORTE S’ASSEMBLA AUTOUR DE LUI. ET LUI AYANT ÔTÉ SES HABITS, ILS LE REVÊTIRENT D’UN MANTEAU D’ÉCARLATE ET TRESSANT UNE COURONNE D’ÉPINES, ILS LA LUI MIRENT SUR LA TÊTE AVEC UN ROSEAU DANS SA MAIN DROITE, ET S’AGENOUILLANT DEVANT LUI, ILS SE MOQUAIENT DE LUI, EN DISANT : SALUT, ROI DES JUIFS. ET LUI CRACHANT AU VISAGE, ILS PRENAIENT LE ROSEAU, ET LUI ET LUI EN FRAPPAIENT LA TÊTE ». (CHAP. 27,27, 28, 29, 30, JUSQU’AU VERSET 45)

ANALYSE.

  • 1 et 2. Jésus-Christ, après avoir essuyé tout ce que la cruauté des plus féroces ennemis a pu inventer de tourments, meurt sur la croix en montrant qu’il est Dieu.
  • 3 et 4. De la force du signe de la croix imprimé avec foi sur le front. – Combien un chrétien doit avoir présente dans son esprit la patience que le Sauveur a témoignée en mourant. – Que ce n’est point être patient que de ne se mettre point en colère, lorsque personne ne nous irrite. – Qu’un chrétien ne doit pas haïr ceux qui le déshonorent, mais ceux qui le louent. – Que la bonne vie est au-dessus de la médisance.


1. Il semble que le démon alors avait comme donné un signal pour faire conspirer tout le monde contre Jésus-Christ. Soit, l’envie et la jalousie dont les Juifs étaient consumés, les portait à se déchaîner contre lui ; mais les soldats, quelle raison pouvaient-ils avoir de l’insulter ? N’est-ce pas visiblement le démon qui les animait ? Ils trouvaient leur plaisir dans ces outrages sanglants, et ils faisaient un jeu de leur cruauté. Au lieu de répandre des larmes et d’être touchés de regret, comme fit ensuite le peuple, ils se conduisirent tout différemment. Ils ajoutèrent injure sur injure, et outrage sur outrage ; soit peut-être pour plaire eux aussi aux Juifs, ou pour satisfaire leur humeur qui d’elle-même était brutale et cruelle. Ils lui insultèrent en cent manières différentes : tantôt ils frappaient sa tête sacrée d’un roseau ; tantôt ils lui donnaient des soufflets ; tantôt ils le perçaient d’une couronne d’épines, faisant une raillerie de ce traitement si barbare.
Quelle excuse pouvons-nous avoir lorsque nous trouvons les moindres mépris insupportables, après un si grand exemple que nous donne le Sauveur du monde ? Car l’insulte et la violence peuvent-elles aller au-delà de ce qu’il souffre, et non seulement dans un de ses membres, mais dans tout son corps ? Sa tête est percée d’épines, frappée d’un roseau, et meurtrie de coups de poing. Son visage est couvert de crachats, ses joues de soufflets, tout son corps déchiré par la flagellation, déshonoré par la nudité, et encore plus par ce manteau d’écarlate dont on le couvre, pour lui insulter par de cruelles adorations, comme à un roi de théâtre. Sa main porte un roseau au lieu de sceptre. On ne pardonne pas même à sa bouche et à sa langue, à laquelle on fait sentir l’âpreté du fiel et du vinaigre.
Que peut-on s’imaginer de plus insupportable que tous ces traitements ? ne sont-ils pas au-dessus de nos paroles et de nos pensées. Il semble que ces cruels Juifs avaient peur d’oublier quelque genre de cruauté dont ils ne fissent l’essai sur le Sauveur. Après s’être accoutumés à répandre le sang des prophètes, ils répandent enfin celui du Fils de Dieu même. Ils le condamnent eux-mêmes à la mort, quoiqu’ils se couvrent du nom de Pilate. Ils veulent « que son sang retombe sur eux et sur leurs enfants ». Ce sont eux seuls qui lui font toutes ces insultes, qui le lient, qui le mènent à Pilate, et qui le font traiter si outrageusement et si cruellement par les soldats. Pilate n’avait rien ordonné de tout ceci :