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et même dans les plantes, comme les concombres, les melons et les raves, il est permis de dire que Dieu lui-même s’écoule en un concombre.
Voulons-nous donc dire que l’Esprit-Saint s’est bâti un temple dans le sein virginal de Marie, ils sourient de dédain ; et quand nous ajoutons qu’il habite dans le sanctuaire de notre âme, nous provoquons leurs railleries. Et cependant ils ne rougissent point, par un nouveau genre d’idolâtrie, d’abaisser la substance divine jusqu’à un concombre, un melon, une mouche, un hanneton et un âne. Mais ce n’est pas la rave, direz-vous, qui est en Dieu, et c’est Dieu qui est dans la rave ; car jamais la rave n’a été Dieu. – Et pourquoi reculez-vous devant cet écoulement de la divinité dans les corps ? – Parce que ce serait peu digne de Dieu. – Mais votre système est mille fois plus indigne de lui. – Je ne saurais l’avouer. – Et pourquoi ? – C’est qu’il n’est réellement indigne de Dieu que d’habiter dans l’homme. – Découvrez-vous le venin de l’impiété ?
Mais pourquoi nient-ils la résurrection des corps, et que disent-ils à ce sujet ? C’est que, selon eux, la chair est essentiellement mauvaise. Et comment, leur dirais-je, connaissez-vous Dieu et la nature ? Comment encore un sage peut-il acquérir la sagesse sans le secours du corps ? détruisez les sens, et que pourrez-vous savoir et apprendre ? Quelle ignorance serait donc le partage de l’âme, si nos sens étaient viciés dans leur principe ! Car il suffit, pour affaiblir ses facultés, qu’une partie du corps, le cerveau par exemple, soit lésée ; et que serait-ce si le corps tout entier était mauvais ! Montrez-moi l’âme en dehors du corps et n’entendez-vous pas les médecins dire chaque jour qu’une maladie violente affaiblit nos facultés mentales ? Pourquoi donc, leur dirai-je encore, ne vous détruisez-vous pas ? Car le corps n’est-il pas matière ? – Certainement. – Vous devriez donc le haïr : et pourquoi encore lui prodiguez-vous la nourriture et mille caresses, quand depuis longtemps vous auriez dû le détruire et briser votre prison ? Mais peut-être Dieu ne peut-il agir sur la matière, s’il ne s’infuse en elle, et ne peut-il lui commander, s’il ne se mêle avec elle, et ne se répand en toutes ses parties ? Quelle faiblesse de raisonnement ! Dans un État, tous obéissent aux ordres du prince, et Dieu ne commanderait pas un principe mauvais ! Mais, en résumé, la matière elle-même ne saurait subsister, si elle ne contenait un peu de bien, car le mal ne peut exister sans cette adjonction, et, s’il n’était joint à quelque vertu, il n’existerait point. Telle est la condition du mal.
Supposez, en effet, un voluptueux qui ne se contraigne jamais, et il ne vivra pas dix jours : un malfaiteur qui attaque même ses complices, et il sera bientôt condamné à mort : un voleur qui dérobe publiquement, et il sera promptement jugé. Telle est donc la nature du mal, qu’il ne peut subsister que par le mélange de quelque bien, et telles sont, selon eux, les conditions d’existence gaie Dieu lui a imposées. Une société uniquement composée de citoyens pervers, ne saurait se soutenir ; et les méchants tombent dès qu’ils s’élèvent non plus contre les bons, mais contre eux-mêmes. « En vérité, ces hommes qui se disent sages sont devenus fous ». (Rom. 1,22) Car, si le corps de l’homme est mauvais, pourquoi les éléments qui nous environnent, l’eau, la terre, la lumière et l’air, ont-ils été créés ? Car l’air est un corps, quoiqu’il manque d’épaisseur et de solidité. Nous avons bien raison de dire, avec le Psalmiste : « Les impies m’ont raconté leurs fables ». (Ps. 118,85) Mais ce langage est intolérable, et nous ne devons plus l’écouter. Oui, la résurrection des corps est certaine ; c’est le dogme que proclament le tombeau vide du Sauveur et le bois auquel il a été attaché. D’ailleurs, les apôtres ne disent-ils pas : « Nous avons mangé et nous avons bu avec lui ? » Croyons donc à la résurrection, et que nos mœurs soient en rapport avec notre foi, nous obtiendrons ainsi les biens éternels, par Jésus-Christ Notre-Seigneur, à qui soient, avec le Père et l’Esprit-Saint, la gloire, l’honneur et l’empire, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.