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sont sublimes et bien dignes d’être recherchés. Mais nul ne témoigne un sincère désir de se purifier par le baptême, et chacun le renvoie même à ce moment suprême, qui est bien plus l’heure de faire un testament que de demander l’initiation sacrée. Car celle-ci exige un esprit sain et une âme sobre et vigilante. Ainsi parlent les gentils ; et moi j’ajoute que, dans l’état où vous demandez le baptême, vous ne voudriez pas faire un testament de peur de donner prise à quelques chicanes. C’est pourquoi on a soin d’ajouter cette clause à tout testament : Moi vivant, et jouissant de toutes mes facultés, j’écris les présentes dispositions. Comment donc le catéchumène, qui n’a pas la conscience de ses actions, pourra-t-il dignement recevoir le saint baptême ?
Mais si les lois interdisent à celui qui ne possède point le plein usage de sa raison, de disposer de choses terrestres et de sa propre fortune, quand il s’agit du royaume des cieux et de ses biens infinis, serez-vous capable, affaibli par la maladie, de recevoir pleinement l’instruction chrétienne ? Comment pourrez-vous dire que vous êtes enseveli avec Jésus-Christ, puisque vous êtes sur le point de quitter la vie ? Que dis-je ? les paroles ne suffisent pas et la reconnaissance doit se manifester par les œuvres. Mais vous agissez comme celui qui se fait inscrire pour la milice lorsque la guerre est terminée, ou comme l’athlète qui se dépouille de ses vêtements quand les spectateurs quittent le cirque. Et en effet, le soldat ne revêt point son armure pour prendre incontinent la fuite, mais il veut combattre l’ennemi et remporter la victoire. Au reste, n’accusez point mes paroles d’être intempestives, parce que nous ne sommes plus au temps du carême ; car c’est pour moi une peine extrême que de vous voir observer si scrupuleusement à cet égard les temps et les moments. L’eunuque dont il est parlé au livre des Actes était en voyage, et toutefois il n’attendit pas une circonstance plus favorable. Et le geôlier de la prison où l’apôtre était détenu, le voyant battu de verges, chargé de fers et exposé à une longue captivité, se hâta de recevoir le baptême. Mais ici, on ne peut alléguer ni les embarras du voyage, ni les rigueurs de la prison, et l’on diffère jusqu’au dernier soupir.
8. Doutez-vous encore de la divinité de Jésus-Christ ? Eh bien ! sortez de ce lieu, n’écoutez plus la parole sainte, et rasez votre nom de la liste des catéchumènes. Mais si vous croyez au Christ Dieu et homme, et si vous êtes éclairé sur la religion, pourquoi ces retards, ces délais et cette négligence ? Je crains, dites-vous, de retomber dans le péché. Eh ! vous ne craignez pas un malheur plus grand encore, celui de quitter la vie tout chargé du poids de vos iniquités. Car l’on est plus coupable de ne pas recevoir la grâce qui nous est offerte, que d’échouer dans ses efforts pour la conserver. Dites-moi, que répondrez-vous au Seigneur quand il vous demandera pourquoi vous ne vous êtes pas approché du sacrement de la régénération, ou pourquoi vous n’en avez pas entièrement rempli les engagements ? Ici vous pourrez alléguer la difficulté des commandements et des vertus ; mais il n’en est pas de même à l’égard du baptême, puisqu’il est une grâce toute gratuite et un plein affranchissement.
Vous craignez de retomber dans le péché c’est bon à dire après le baptême ; et c’est alors en effet que vous devrez craindre de perdre votre liberté. Mais aujourd’hui pourquoi craindre d’en recevoir le don gratuit ? Eh quoi ! avant le baptême vous êtes pieux et fervent, et après le baptême vous seriez tâche et négligent ! Vous voulez attendre l’époque du carême. Et pourquoi ? Ce temps est-il plus privilégié qu’un autre ? Car ce ne fut pas au temps de Pâques, mais dans un autre, que les apôtres reçurent cette grâce. Ces huit mille hommes convertis par saint Pierre, le centurion Corneille, l’eunuque de la reine Candace et une multitude d’autres, n’ont pas été baptisés dans les solennités pascales. C’est pourquoi ne différons pas jusqu’à ce terme encore éloigné, de peur que, retardant toujours, nous ne soyons surpris par la mort vides de ce bienfait et privés de cette grâce. Ah ! vous ne sauriez croire combien je souffre lorsque, apprenant qu’un d’entre vous est mort sans baptême, je songe aux épouvantables tourments et aux inévitables supplices de l’enfer ! Mais mon anxiété n’est pas moins douloureuse quand j’en vois d’autres toucher à leurs derniers moments et ne témoigner aucun désir du baptême.
Aussi comme les choses se passent alors tout contrairement à la dignité de ce sacrement ! Car le baptême devrait toujours être une occasion de joies pieuses, de réjouissances et de