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HOMÉLIE LXXIX.

ENCORE UN PEU DE TEMPS, ET VOUS NE ME VERREZ PLUS ; ET ENCORE UN PEU DE TEMPS, ET VOUS ME VERREZ. — SUR CELA, QUELQUES-UNS DE SES DISCIPLES SE DIRENT LES UNS AUX AUTRES : QUE VEUT-IL DIRE PAR LÀ : ENCORE UN PEU DE TEMPS ? ET LE RESTE. (VERS. 16, 17, JUSQU’À LA FIN DU CHAPITRE XVI)

ANALYSE.

  • 1. Jésus-Christ afflige ses disciples en leur disant qu’il va bientôt les quitter, il leur prédit qu’ils seront dans une grande angoisse, mais courte, et qui se changera en une joie qui ne finira plus.
  • 2. On obtient du Père tout ce qu’on lui demande au nom de Jésus-Christ.
  • 3-5. Comment on peut vaincre le monde. — La mort ne rend point l’homme mortel : la victoire le rend immortel. — On ne peut point dire mortel celui qui doit ressusciter après sa mort. — Distinguer l’habitude de ce qui est passager. — La mort n’étant que pour un temps, ne doit point être appelée une mort : autrement dormir, c’est mourir. — La corruption du corps n’empêche point sa résurrection, puisqu’il sera revêtu de l’incorruptibilité. — Moyens de vaincre le monde. — Considérations qui nous doivent faire mépriser les peines et les afflictions de cette vie : nous sommes dans une terre étrangère, éloignés de notre patrie. — Ce qui rend une offense plus ou moins grande. — Celui qui nous offense ne nous connaît point, cela rend l’offense légère ; quand il saura qui nous sommes, il s’accusera de folie. — Vouloir se venger, c’est ajouter sa vengeance aux vengeances divines ; cruauté qu’il y a eu cela. — L’injure d’un ami ne nous blesse point tant que celle d’un inconnu ; raison de cela : nous sommes les membres les uns des autres et un seul corps. — Ancien proverbe : supporter ses amis avec leurs défauts. — Description de ce que les amants souffrent des femmes débauchées, pour servir d’exemple de ce qu’on doit souffrir et des amis, et pour Dieu. — S’aimer les uns les autres. — Aimer Dieu comme l’on a aimé sa maîtresse. — Différence entre (amour de Dieu et l’amour d’une femme prostituée. — Maux qu’attire à l’homme l’amour d’une femme débauchée ; biens que lui procure l’amour de Dieu. — On fait plus pour une maîtresse que pour Dieu et pour soi. — Dureté qu’on a pour les pauvres. — Belle exhortation à l’aumône. — Différence de la vie spirituelle et de la vie charnelle et voluptueuse.

1. Rien n’abat une âme accablée de douleur et de tristesse comme d’entendre souvent répéter les paroles qui causent sa tristesse et sa douleur. Pourquoi donc Jésus-Christ, ayant dit : « Je m’en vais », et : « Je ne vous parlerai plus », répète-t-il souvent ces paroles : « Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus » ; et : « Je m’en vais à celui qui m’a envoyé ? » Après avoir consolé et réjoui ses disciples par la promesse du Saint-Esprit, il les jette encore dans l’abattement. Pourquoi le Sauveur fait-il donc cela ? Il sonde leur cœur et les met à une plus grande épreuve, et il les accoutume sagement à entendre dans la paix et la docilité les paroles tristes et affligeantes, afin qu’ils supportent ensuite son départ avec courage et avec fermeté. Les disciples ayant eu tout le temps de réfléchir sur ce que leur Maître leur avait prédit, devaient véritablement ensuite souffrir la séparation avec plus de facilité. Que si l’on examine avec soin ses paroles, on y trouvera une consolation en ce qu’il dit « Je m’en vais à mon Père ». Il leur fait connaître qu’il ne périra point, mais que sa mort sera seulement un passage, une translation. Le Seigneur leur donne encore une autre consolation, car il ne dit pas simplement : « Encore un peu de temps, et vous ne me verrez plus » ; mais il a ajouté aussi : « Encore un peu de temps, et vous me verrez » ; marquant qu’il reviendrait, que la séparation ne serait pas longue, et qu’ensuite il demeurerait toujours avec eux ; mais certainement ils ne le comprirent pas. Et on a raison de s’étonner, qu’ayant souvent entendu ces choses, ils ne les aient pas plus comprises que si on ne leur en avait jamais parlé.

Mais pourquoi les disciples ne les ont-ils pas comprises ? C’est, ou à cause de leur tristesse, comme je le pense, car la tristesse effaçait toutes ces paroles de leur mémoire, ou à cause de leur obscurité ; de sorte que ce qui véritablement