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mes paroles : et la parole que vous avez entendue, n’est point ma parole, mais celle de celui qui m’a envoyé (24) ». C’est pourquoi celui qui ne garde point ces paroles, n’aime ni mon Père, ni moi ; si l’observance des commandements est le témoignage et la preuve de l’amour, et si ces commandements sont de mon Père, celui qui les garde n’aime pas seulement le Fils, mais encore le Père. Mais comment la parole peut-elle être votre parole et ne l’être point ? Cela signifie : Je ne dis rien sans mon Père ; je ne dis rien qui ne soit conforme à sa volonté.

« Je vous ai dit ceci, demeurant encore avec vous (25) ». Ces paroles étaient obscures ; les disciples ne comprenaient point les unes, et doutaient sur le plus grand nombre. Jésus-Christ, pour les empêcher de se troubler encore, et de dire : Quels sont ces commandements que vous nous donnez ? les tire de toute inquiétude, en ajoutant : « Mais le Consolateur que mon Père enverra en a mon nom, sera celui qui vous enseignera « (26). » Peut-être, ce que je vous dis maintenant est obscur ; mais ce docteur vous enseignera clairement toutes choses. Et ce mot : « L’Esprit-Saint demeurera avec vous », leur insinue qu’il doit s’en aller. Après, de peur qu’ils ne s’attristent, il leur dit que tant qu’il demeurera avec eux, et que le Saint-Esprit ne viendra point, ils ne pourront s’élever à rien de grand et de sublime.

Jésus-Christ leur dit ces choses pour les disposer à supporter courageusement son départ et une absence qui leur doit procurer de si grands biens. Il nomme souvent le Consolateur, à cause de la tristesse et de l’affliction où il les voit maintenant. Comme donc ce qu’ils ont entendu, comme la pensée de tant d’afflictions, de guerres et du départ de leur Maître les agite et les trouble, voyez, mes frères, voyez comment le divin Sauveur les console de nouveau, en disant : « Je vous laisse la paix (27) ». Et c’est de même que s’il leur disait : Quelle perte, quel dommage peuvent vous causer les guerres et les troubles de ce monde, si vous avez ma paix ? Cette paix est bien différente des autres. La paix du monde est souvent inutile et pernicieuse, elle ne nous apporte aucun bien. Mais moi, je vous en donne une qui vous fera vivre dans une concorde mutuelle, une paix qui vous rendra plus fermes et plus courageux. Et encore comme cette expression : « Je vous donne la paix », marquait son départ, et pouvait les troubler, il leur dit de nouveau : « Que votre cœur ne se trouble point, et qu’il ne soit point saisi de frayeur ». Vous le voyez bien, mes frères, que le trouble des disciples venait en partie de leur amour et en partie aussi de leur crainte. « Vous m’avez ouï dire : Je m’en vais à mon Père, et je reviens à vous. Si vous m’aimiez, vous vous réjouiriez de ce que je m’en vais à mon Père, parce que mon Père « est plus grand que moi (28) ». Quelle joie, quelle consolation cette parole ne devait-elle pas répandre dans leur cœur ?

4. Que veut dire cette parole : « Mon Père est plus grand que moi ? » Elle nous apprend que les disciples n’avaient nulle connaissance encore de la résurrection, et qu’ils n’avaient point de Jésus-Christ l’opinion qu’il en fallait avoir. Et comment auraient-ils eu cette opinion, eux qui ne savaient même pas qu’il ressusciterait ? Mais, au contraire, ils croyaient que le Père était grand. Voici donc ce que veut dire le Sauveur à ses disciples : Si vous craignez pour moi, comme si je ne pouvais pas seul me défendre et me soutenir contre mes ennemis, et si vous n’espérez pas que je puisse me faire voir à vous après mon crucifiement, après ma mort, néanmoins m’entendant dire que je vais à mon Père, vous devez enfin vous réjouir, puisque je vais à celui qui est plus grand, et capable de porter remède à tous les maux que je vous ai prédits. « Vous avez ouï que je vous ai dit » : Pourquoi Jésus-Christ a-t-il ajouté ces paroles ? Pour dire : J’ai tant de confiance à mes œuvres, que je ne crains pas de vous faire ces prédictions.

« Je vous dis ceci dès maintenant, et je vous l’ai prédit avant qu’il arrive, afin que lorsqu’il arrivera, vous » me « reconnaissiez » pour « ce que je suis[1] (29) ». C’est comme s’il disait : Le sauriez-vous, si je ne vous le disais pas ? Et je ne vous le dirais pas, si je n’avais confiance[2]. Ne le voyez-vous pas, que ce discours est accommodé à la portée des auditeurs ? Lorsque Jésus-Christ dit : « Croyez-vous que je ne puisse pas prier mon Père, et qu’il ne m’enverrait pas ici en même temps plus de

  1. Ce passage est composé et de ce verset 29, chap. 14, et du verset 29 du chap. XIII.
  2. Si je n’avais de la confiance en vous, c’est-à-dire : Si je ne savais que mes œuvres vous ont fait connaître qui je suis.