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Mais en attendant, expliquons ce qui se présente ici. Il nous a utilement nommé ses sueurs : et de Marie, qui s’est rendue illustre et célèbre par une belle action, il a dit : « Cette Marie était celle qui répandit sur le Seigneur « une huile de parfum ».
Quelques-uns font ici une question : ils demandent pourquoi Jésus-Christ permit que cette femme répandît ce parfum. C’est pourquoi il faut d’abord vous avertir que celle-ci n’est point la femme de mauvaise vie dont parle saint Matthieu, ni celle dont parle saint tue, mais une autre, et une femme vertueuse : celles-là étaient des pécheresses, mais celle-ci est une honnête femme, et une femme attentive et appliquée à ses devoirs : Car elle eut grand soin de bien recevoir Jésus-Christ. L’évangéliste rapporte que ces deux sueurs aimaient aussi Jésus-Christ : et cependant il laissa mourir Lazare. Pourquoi, comme le centenier et l’officier, ne quittèrent-elles pas leur frère malade, pour aller elles-mêmes chercher le Sauveur, au lieu de se borner à lui envoyer quelqu’un ? C’est qu’elles avaient en lui une grande confiance, et qu’elles étaient fort liées avec lui. De plus, c’étaient des femmes délicates, de peu de santé, et accablées de leur affliction. Elles firent voir dans la suite que ce n’était point par mépris qu’elles en avaient usé de la sorte. Au reste, il est évident que Marie, sœur de Lazare, n’est point la femme de mauvaise vie dont ailleurs il est fait mention.
Mais, direz-vous, cette femme débauchée ; pourquoi Jésus-Christ la reçut-il ? Pour la convertir, pour lui remettre ses péchés, pour montrer son humanité, pour vous apprendre qu’il n’est point de maladie due sa bonté ne guérisse, point de péché qui surpasse sa miséricorde. Ne vous arrêtez donc pas seulement à ce que Jésus l’a reçue, mais considérez aussi de quelle manière il l’a convertie. Et pourquoi l’évangéliste raconte-t-il cette histoire, ou plutôt que veut-il nous apprendre par ces paroles : « Or, Jésus aimait Marthe, et sa sœur, et Lazare (5) ? » Il veut que nous ne nous indignions pas, ou que nous ne nous chagrinions pas, lorsque nous voyons des gens de bien et les amis de Dieu tomber dans des maladies. « Celui que vous aimez est malade (3) ». Ils voulaient toucher Jésus-Christ de compassion, le regardant encore comme un homme, ce que la suite de leur discours fait bien voir : « Si vous eussiez été ici, il ne serait pas mort » ; et ils ne dirent pas : Lazare est malade, mais : « Celui que vous aimez est malade ». Que leur répondit donc Jésus-Christ ? « Cette maladie ne va point à la mort, mais elle n’est que pour la gloire de Dieu ; et afin que le Fils de Dieu en soit glorifié (4) ». Remarquez que Jésus-Christ déclare encore que sa gloire est la même que celle du Père ; car ayant dit : « La gloire de Dieu », il a ajouté : « Afin que le Fils de Dieu en soit glorifié ».
« Cette maladie ne va point à la mort ». Comme il devait demeurer encore deux jours au lieu où il était, il renvoya ceux qu’on lui avait envoyés pour porter cette réponse aux deux sueurs. Sur quoi il y a lieu de s’étonner qu’elles ne se soient point offensées, ni scandalisées de voir mourir leur frère, après que Jésus avait répondu que sa maladie n’allait point à la mort : de voir arriver le contraire de et qu’avait dit l’auteur de la vie. Mais, sans se troubler, elles allèrent au-devant de Jésus, et ne crurent pas qu’il leur eût fait dire une chose fausse. Au reste, cette particule : « Afin que », ne marque point la cause de la maladie, mais l’effet qu’elle devait produire : elle avait une autre origine, mais Jésus-Christ s’en servit pour la gloire de Dieu.
« Et ayant dit ces choses, il demeura encore deux jours au lieu où il était (6) ». Pourquoi y demeura-t-il ? Afin que Lazare mourût et fût enseveli, et qu’on ne dît pas : Lazare n’était point encore mort, lorsque Jésus l’a ressuscité : il était seulement assoupi, ou il était tombé en défaillance : il n’était pas mort. Jésus demeura donc assez longtemps pour que, le corps de Lazare s’étant corrompu, ils eussent lieu de dire : « Il sent déjà mauvais (7) ». Et il dit ensuite à ses disciples : « Allons en Judée (39) ». Pourquoi le Sauveur, qui n’avait jamais prévenu de ce qu’il allait faire, prévient-il ici ses disciples ? C’est parce qu’il les voyait dans une grande consternation : il leur annonce ce qu’il va faire, dupeur que, dans la crainte où ils étaient, ils ne fussent tout troublés de ce départ inattendu.
Mais que répondirent les disciples ? « Il n’y a qu’un moment que les Juifs vous voulaient lapider, et vous retournez chez eux (8) ? ». Ils craignaient effectivement pour leur Maître, mais beaucoup plus pour eux-mêmes, étant encore bien imparfaits. C’est pourquoi, Thomas tout tremblant de peur, dit : « Allons-y