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des aveugles ? » Ceux-ci ne pouvaient pas imposer silence aux autres par les paroles mêmes que Jésus-Christ avait dites ; ils le font au moyen de ses œuvres. Sûrement, ses paroles mêmes ne sont pas celles d’un homme possédé du démon ; mais si fous ne voulez pas croire ni obéir à ses paroles, laissez-vous persuader par ses œuvres. Si ses actions ne peuvent provenir d’un homme possédé du démon, et si au contraire elles sont plus qu’humaines, il est visible qu’elles viennent d’une vertu divine. Remarquez-vous la force de cet argument ? Car, d’une part il était visible qu’ils ne disaient : « Il est possédé du démon », que parce que ses paroles étaient au-dessus de l’homme ; et de l’autre Jésus-Christ aussi a fait évidemment connaître, par les œuvres qu’il a faites, qu’il n’était point possédé du démon.
Que répondit donc Jésus-Christ à ces injures ? Il ne fit aucune réponse. Auparavant il leur avait répondu : « Je ne suis point possédé a du démon ». Mais maintenant il ne dit mot : leur ayant donné, par ses œuvres mêmes, une preuve sensible qu’il n’était point possédé du démon, il garda le silence. Ils n’étaient pas dignes de réponse, puisqu’ils le disaient possédé, pour des œuvres qu’il fallait admirer, et qui devaient les persuader de sa divinité. Mais qu’était-il besoin qu’il les réfutât, quand ils étaient divisés et se réfutaient mutuellement ? Il demeurait donc dans le silence, et souffrait tout avec beaucoup de tranquillité, non pour cette raison seulement, mais encore pour nous former à la douceur et à la patience.
4. Imitons donc Jésus-Christ : car il ne s’est pas borné à garder alors le silence, mais aujourd’hui, si on l’interroge, il répond, et il donne des marques et des signes visibles de sa providence. Des hommes qu’il avait comblés de mille bienfaits, à qui il avait fait du bien, non une ou deux fois, mais plusieurs, l’ont appelé démoniaque et insensé, et non seulement il ne s’est point vengé, mais encore il n’a point cessé de leur faire du bien. Et que dis-je, de leur faire du bien ? Il donne sa vie pour eux, et il prie son Père pour ceux qui l’ont crucifié. Ces exemples, que nous donne le divin Sauveur, suivons-les donc aussi nous-mêmes, car c’est véritablement être disciple de Jésus-Christ que d’être doux et patient.
Mais par où parviendrons-nous à cette douceur ? En repassant souvent nos péchés dans notre mémoire, en les pleurant avec amertume. L’âme qui vit dans cette tristesse, qui est pénétrée de la douleur de ses péchés, ne se met point en colère et ne s’offense de rien. Où est le deuil, là il rie peut y avoir de colère ; où est la douleur, là il n’y a nul emportement ; où est la componction de cœur, il n’y a ni dissensions ni querelles. Un cœur triste et affligé n’a point le temps ni la force de s’irriter, mais il jettera de profonds soupirs, il répandra des larmes amères. Je sais que plusieurs de mes auditeurs rient de ce que je dis ; mais moi, je ne cesserai point de déplorer le malheur de ceux qui rient. La vie présente est une vie de pleurs, de larmes et de gémissements. En effet, nous faisons bien des péchés par nos paroles et par nos actions. Or, ceux qui commettent ces péchés tomberont dans l’enfer, dans un fleuve ardent, dans un gouffre plein de feu, et perdront le royaume des cieux : ce qui est le plus grand et le plus terrible de tous les malheurs. Après une telle menace, dites-le-moi, mon cher auditeur, riez-vous encore, pouvez-vous vivre dans les délices, et votre Seigneur étant en colère contre vous, et vous menaçant dans sa fureur, demeurerez-vous dans votre péché ? Par cette conduite ne craindrez-vous pas d’attiser vous-même le feu de la fournaise où vous allez être jeté ? N’entendez-vous pas la voix de Jésus-Christ, qui vous crie tous les jours : « Vous m’avez vu avoir faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; vous m’avez vu avoir soif, et vous ne m’avez pas donné à boire : Retirez-vous de moi », allez « au feu a qui avait été préparé pour le diable et pour ses anges ? » (Mt. 25,42) Oui, tous les jours Jésus-Christ vous fait cette menace.
Mais je lui ai donné à manger ? direz-vous. Quand et combien de fois ? Dix ou vingt ? Mais cela ne lui suffit pas, vous lui devez donner à manger pendant tout le temps que vous êtes sur la terre. Car les vierges ont