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HOMÉLIE LVII.


JÉSUS, APRÈS LEUR AVOIR DIT CELA, CRACHA A TERRE, ET AYANT FAIT DE LA BOUE AVEC SA SALIVE, IL OIGNIT DE CETTE BOUE LES YEUX DE L’AVEUGLE ; ET IL LUI DIT : ALLEZ VOUS LAVER DANS LA PISCINE DE SILOÉ. (VERS. 6, 7, JUSQU’AU VERS. 16)

ANALYSE.

  • 1. Foi de l’aveugle-né. – Bonté de Dieu pour tous les hommes sans distinction.
  • 2. Nécessité de la foi partout. – Il y a une paix mauvaise et une guerre qui est bonne:
  • 3. Fuir les méchants, s’attacher aux gens de bien. – Retrancher les membres gangrenés, se séparer des amis dangereux. – En s’en éloignant souvent on les gagne, on les fait rentrer en eux-mêmes. – La société des méchants plus pernicieuse que la peste. – On déshérite les méchants enfants, on doit à plus forte raison fuir les amis qui sont corrompus. – On n’examine pas notre vie, mais on juge de nous par ceux que nous fréquentons. – La compagnie des méchants, dangereuse pour soi, scandaleuse à l’égard des autres.


1. Ceux qui veulent tirer quelque fruit de nos lectures ne doivent pas laisser passer la moindre chose. La raison pour laquelle il nous est ordonné de lire avec soin les Écritures, c’est que, la plupart du temps, ce qui paraît d’abord d’une facile intelligence renferme un sens caché, qui est d’une grande profondeur. Remarquez, en effet, ce que nous présente la lecture que nous venons de faire : « Après avoir dit cela, il cracha à terre ». Pourquoi Jésus crache-t-il ainsi ? Afin que la gloire de Dieu éclate, et parce qu’il faut qu’il fasse les œuvres de celui qui l’a envoyé. En effet, ce n’est pas sans raison que l’évangéliste a rapporté ces choses et qu’il a marqué que Jésus avait craché ; mais c’est pour faire connaître qu’il confirmait sa parole par ses œuvres. Et pourquoi le Sauveur ne s’est-il pas servi de l’eau pour faire la boue, mais de sa salive ? Il devait envoyer l’aveugle à la piscine de Siloé : il a donc craché à terre, de peur qu’on n’attribuât une partie de la guérison à l’eau de cette fontaine, et aussi pour nous apprendre que la vertu qui a formé et ouvert les yeux de cet aveugle, était sortie de sa bouche. C’est dans cette vue que l’évangéliste a dit : « Et il a fait de la boue de sa salive ». Ensuite il ordonna à l’aveugle de se laver, afin qu’on ne crût pas que c’était la terre qui avait opéré la guérison.
Pourquoi donc Jésus-Christ ne l’a-t-il pas faite sur-le-champ et a-t-il envoyé l’aveugle à Siloé ? C’est pour confondre l’opiniâtreté des Juifs et pour vous faire connaître la foi de l’aveugle. Car il est à croire qu’ils le virent tous aller à la fontaine, ayant les yeux oints de boue ; une action si extraordinaire et si inouïe dut attirer sur lui les regards de tout le monde : tous, soit qu’ils le connussent ou non, devaient l’observer avec une attentive curiosité. Comme il n’était pas trop croyable qu’un aveugle-né recouvrât la vue, le Sauveur, en lui faisant faire un long voyage, réunit autour de lui beaucoup de témoins sûrs et irrécusables d’un prodige si nouveau, afin qu’y ayant donné toute leur attention, les Juifs ne pussent pas chanceler ensuite et dire : c’est lui, ce n’est pas lui. De plus, il leur fait voir qu’il n’est pas contraire à la loi, puisqu’il envoie cet homme à la piscine de Siloé. Et il n’était point à craindre qu’on n’attribuât la gloire de cette guérison à la fontaine, plusieurs y ayant lavé leurs yeux, sans en retirer aucune utilité.
Mais ici, c’est la vertu de Jésus-Christ qui opère tout. Voilà pourquoi saint Jean a marqué la signification de Siloé ; car ayant dit : Jésus