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saurait être différent du mien, ni le mien de celui du Père. Mais pourquoi parle-t-il du Père ? Les Juifs ne croyaient pas que le Fils fût digne de foi s’il n’avait le témoignage du Père. Autrement ce qu’il disait serait demeuré sans valeur ; car, parmi les hommes, lorsque deux rendent témoignage dans l’affaire d’autrui, alors leur témoignage est réputé véritable ; c’est là, en effet, le témoignage porté par deux personnes. Mais si quelqu’un se rend témoignage à soi-même, alors il n’y a plus deux témoins.
Voyez-vous bien, mon cher auditeur, que si Jésus-Christ a parlé en ces termes, ça été pour montrer qu’il est consubstantiel à son Père, et que par lui-même ensuite il n’a pas besoin du témoignage d’un autre ; enfin, pour faire voir qu’il n’a rien de moins que le Père ? Reconnaissez donc son autorité dans ces paroles : « Or, je me rends témoignage à moi-même, et mon Père qui m’a envoyé me rend « aussi témoignage (18) ». Jésus-Christ n’aurait pas dit cela, s’il était d’une substance inférieure. Ensuite, pour vous convaincre qu’en parlant ainsi il n’a pas eu en vue le nombre « deux », faites bien attention que sa puissance n’est en rien différente de celle du Père. Un homme rend témoignage lorsque, par lui-même, il est digne de foi et qu’il n’a pas besoin du témoignage d’un autre, et cela, lorsqu’il s’agit d’une affaire qui ne le regarde point et qui lui est étrangère ; mais dans sa propre cause il n 'est pas croyable et il a besoin d’un témoignage. Mais c’est tout le contraire pour Jésus-Christ : lors même qu’il se rend témoignage dans sa propre cause et qu’il dit qu’il a le témoignage d’un autre, il se déclare digne de foi, montrant partout son autorité. En effet, pourquoi ayant dit : « Je ne suis pas seul, mais moi et mon Père qui m’a envoyé », et le témoignage de deux témoins est véritable ; n’en est-il pas demeuré là et a-t-il ajouté : « Je me rends témoignage à moi-même ? » N’est-ce pas uniquement pour montrer son autorité ? Et il se met le premier : « Je me rends témoignage à moi-même ». Ici Jésus-Christ montre qu’il est égal en dignité à son Père et qu’il ne sert de rien aux Juifs de se glorifier de connaître Dieu le Père, s’ils ne le connaissent pas lui-même ; et encore que c’est parce qu’ils ne veulent pas le connaître qu’ils ne le connaissent pas. Jésus leur dit donc qu’on ne peut connaître le Père sans le connaître lui-même, afin de les attirer par là à sa connaissance. Comme ils le négligeaient et cherchaient toujours à connaître directement le Père, il leur dit : « Vous ne pouvez pas connaître le Père sans moi ». C’est pourquoi ceux qui blasphèment contre le Fils, ne blasphèment pas seulement contre le Fils, mais aussi contre le Père.
4. Prenons-y garde, mes chers frères, et glorifions le Fils : sûrement il n’aurait point parlé de la sorte, s’il n’était de même nature que le Père. Que si, étant d’une autre substance que le Père, il l’avait seulement fait connaître, on pourrait connaître le Père sans connaître le Fils : et réciproquement, en connaissant le Père, on ne connaîtrait pas pour cela le Fils. En effet, celui qui connaît l’homme ne connaît pas nécessairement l’ange. Pourtant, direz-vous, celui qui connaît la créature, connaît aussi Dieu. Non, certes. Car plusieurs, ou plutôt tous les hommes, connaissent la créature, parce qu’ils la voient ; mais ils ne connaissent point Dieu pour cela.
Glorifions donc le Fils de Dieu, non seulement en lui rendant la gloire qui lui est due, comme Fils de Dieu, mais encore par nos œuvres. Car la gloire qu’on rend par les paroles n’est rien, si elle n’est accompagnée de l’hommage qui vient des œuvres. « Vous », dit l’apôtre, « qui portez le nom de Juifs, qui vous reposez sur la loi, qui vous faites gloire d’être à Dieu », prenez garde à ce que vous faites : « Vous instruisez les autres et vous ne vous instruisez pas vous-mêmes : vous vous glorifiez dans la loi, et vous déshonorez Dieu par la violation de la loi ? » (Rom. 2,17.21-23) Vous-même, mon cher auditeur, prenez garde que, vous glorifiant d’être dans la foi orthodoxe, vous ne meniez pas une vie conforme à la foi que vous professez ; que vous ne déshonoriez Dieu, en le faisant blasphémer. Dieu veut qu’un chrétien soit le docteur de tout l’univers, le levain, la lumière, le sel. Qu’est-ce que la lumière ? C’est une vie brillante, qui n’est offusquée d’aucun nuage. La lumière n’est point utile à soi, le sel ou le levain pas davantage ; mais ces choses sont utiles à autrui : de même on demande de nous, non seulement ce qui est dans notre intérêt, mais encore ce qui est dans l’intérêt des autres. Car le sel, s’il ne sale pas, n’est plus sel (Mt. 5,13 ; Mc. 9,49) ; par là nous est encore révélée une autre vérité : c’est que, si nous vivons