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sa grandeur, mais des plus simples et des plus grossières. S’il avait une fois parlé des choses divines en propres termes, il n’avait pas besoin de se répéter pour nous instruire, du moins autant qu’il est possible ; mais il n’en est pas de même des paroles simples et grossières, par lesquelles il se mettait à la portée de ses auditeurs : si elles n’eussent été fréquemment répétées, comme il s’agissait de choses sublimes, elles n’auraient point touché, ni ébranlé un auditeur charnel qui rampait à terre. Voilà pourquoi Jésus-Christ a beaucoup plus dit de choses simples que d’élevées : mais de peur que cela ne fît tort à ses disciples, et ne les laissât toujours courbés vers la terre, il ne dit point ces choses simples, il ne se sert point de ces grossières comparaisons, sans marquer pour quelle raison il en use de la sorte : et c’est ce qu’il a fait en cet endroit. Ayant discouru du baptême, et de cette renaissance qu’opère la grâce ; voulant parler ensuite de son ineffable et mystérieuse génération, il interrompt son discours et il en déclare lui-même la cause. Quelle est-elle ? c’est la grossièreté et la faiblesse de ses auditeurs : il l’a même insinué incontinent après par ces paroles : « Si vous ne me croyez pas lorsque je vous parle des choses de la terre, comment me croirez-vous quand je vous parlerai des choses du ciel ? » C’est pourquoi, quand Jésus-Christ dit quelque chose de simple et de grossier, il faut en attribuer la raison à la faiblesse et à la grossièreté de ses auditeurs.
Au reste quelques-uns croient qu’en cet endroit ces mots : les choses de la terre, signifient le vent, et que cela revient à dire : si vous ayant donné l’exemple des choses de la terre, néanmoins je ne me suis pas fait entendre, comment pourrez-vous comprendre des choses qui sont très-élevées et très-sublimes ? mais s’il appelle ici le baptême terrestre, n’en soyez f pas surpris : il l’appelle ainsi, ou parce qu’il est conféré sur la terre, ou parce qu’il le compare j avec sa redoutable génération ; car quoique la renaissance qu’opère le baptême soit céleste, si néanmoins on la compare avec cette génération que produit la substance du Père, on peut la dire terrestre. Et remarquez que Jésus-Christ n’a point dit : Vous ne comprenez pas ; mais : Vous ne croyez pas. En effet, accuser de folie celui qui ne veut pas croire, ne le comprenant pas, ce qui est du domaine de la raison, rien n’est plus juste : et au contraire si quelqu’un refuse de recevoir ce que la raison n’admet pas et qui n’est accessible qu’à la foi, on ne l’accuse pas de folie, mais on le blâme à cause de son incrédulité. Jésus-Christ donc voulant ramener Nicodème, lui parle avec plus de force et lui reproche son incrédulité, afin qu’il ne cherche pas à comprendre par le raisonnement le sens de ses paroles mais si la foi nous oblige de croire à notre régénération, quel supplice ne méritent pas ceux qui cherchent à connaître par la raison la génération du Fils unique ?
Mais peut-être quelqu’un dira : pourquoi Jésus-Christ a-t-il dit ces choses, si ses auditeurs devaient refuser de les croire ? C’est parce que si ceux-là ne les croyaient pas, il était sûr que les hommes qui viendraient après eux les croiraient, et en retireraient un grand avantage. Jésus-Christ donc, parlant à Nicodème avec beaucoup de force, lui fait voir enfin que non seulement il connaît ces choses, mais encore bien d’autres, incomparablement plus grandes ; ce qu’il montre par les paroles qui suivent, où il dit : « Personne n’est monté au ciel, que celui qui est descendu du ciel », savoir : « le Fils de l’homme qui est dans le ciel ». Et quelle est, direz-vous, cette conséquence ? elle est très-grande et très-bien liée à ce qui précède ; Nicodème avait dit : « Nous savons que vous êtes venu de la part de Dieu » pour nous instruire comme « un docteur » ; Jésus-Christ amende ces paroles, en lui disant, ou à peu près : Ne pensez pas que je sois docteur, comme l’ont été plusieurs prophètes, qui étaient des hommes terrestres, car moi, je viens du ciel. Aucun des prophètes n’est monté au ciel, et moi j’y habite. Ne voyez-vous pas, mes frères, que ce qui paraît même très-élevé reste fort au-dessous d’une telle grandeur ? Car Jésus-Christ n’est pas seulement dans le ciel, il est partout, il remplit tout ; mais il se rabaisse encore à la portée et à la faiblesse de son auditeur, afin de l’élever peu à peu. Au reste, en cet endroit, Jésus-Christ n’appelle pas la chair le Fils de l’homme, mais il se désigne tout entier, pour ainsi parler, par le nom de la moindre substance. En effet, il a coutume de se nommer tout entier, tantôt par la divinité, tantôt par l’humanité.
« Et comme Moïse éleva dans le désert le serpent » d’airain, « il faut de même que le Fils de l’homme soit élevé en haut (14) ». Ceci encore parait ne pas se rattacher à ce qui