Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/212

Cette page n’a pas encore été corrigée

peu après à Jérusalem ; il y fut alors, parce qu’il ne voulait pas mener partout avec lui sa mère et ses frères. Y ayant donc été, il s’y arrêta quelque temps par considération pour sa 'mère, et l’y ayant laissée, il opéra encore des miracles (43). C’est pourquoi l’évangéliste dit qu’ayant demeuré quelque temps à Capharnaüm, il alla de là à Jérusalem. Jésus fut donc baptisé peu de jours avant la Pâque. Et à Jérusalem que fait-il ? une action de grande autorité (14, 15). Il chassa du temple tous les marchands qu’il y trouva, les changeurs, ceux qui vendaient des colombes, et des bœufs, et des moutons, et qui se tenaient là pour leur trafic.
2. Un autre évangéliste rapporte qu’en chassant ces gens, il avait dit : « Ne faites pas de la « maison de mon père une caverne de voleurs ». (Mt. 20,13 ; Mc. 11,17 ; Lc. 19,46) Et saint Jean dit : « Une maison de trafic (16) ». En quoi pourtant ils ne se contredisent point. Mais ils nous apprennent que Jésus a chassé du temple ces vendeurs à deux reprises ; cette première fois au commencement de la prédication, l’autre lorsqu’il approchait du temps de sa passion : c’est pour cela que, parlant alors plus durement, il dit : Pourquoi faites-vous de la maison de mon Père une caverne ? ce qu’il ne fait pas dans cette première occurrence, où sa réprimande est plus modérée : ce qui explique qu’il ait recommencé.
Et pourquoi, direz-vous, Jésus-Christ les a-t-il ainsi chassés, et avec une violence qu’il n’a montrée en aucune autre occasion, lors même que les Juifs le chargeaient d’outrages et d’injures, l’appelaient samaritain et démoniaque ? Car il ne s’en tint pas aux paroles, il alla jusqu’à prendre un fouet pour chasser ces hommes. Mais les Juifs, si prompts à la colère, quand ils le voyaient faire du bien aux autres, se conduisent autrement après ce châtiment qui aurait dû, ce semble, les exaspérer. En effet, ils ne firent point de reproches à Jésus, ils ne l’outragèrent point ; mais que lui dirent-ils ? « Par quel miracle nous montrez-vous que vous avez droit de faire de telles choses ? (18) ». Ne remarquez-vous pas leur furieuse jalousie, et comment le bien fait à autrui les indignait bien davantage ? Jésus-Christ donc reproche aux Juifs, tantôt d’avoir fait du temple une caverne de voleurs, indiquant par là que ce qu’on y vendait avait été volé, et provenait de rapine et d’avarice, et qu’ils s’enrichissaient de la misère d’autrui ; tantôt qu’ils en avaient fait une maison de trafic, par allusion à leurs commerces honteux.
Mais pourquoi Jésus fit-il cela ? Parce qu’il devait guérir des malades le jour du sabbat et faire bien des choses qu’ils regarderaient comme une violation de la loi ; il le fit pour ne point paraître en cela un rival, un ennemi de son Père ; par là il prévint tous ces soupçons ; celui qui avait fait paraître tant de zèle pour l’honneur du temple, ne pouvait pas aller à l’encontre du Maître qui y était adoré. Les premières années de sa vie, dans lesquelles il avait vécu selon la loi, suffisaient pour prouver qu’il respectait le Législateur, et qu’il ne venait point substituer une loi à la sienne. Mais comme ces premières années pouvaient être oubliées, ou parce que tous n’en avaient pas connaissance, ou parce qu’il avait été élevé dans une pauvre maison, il fait cette action d’éclat en présence de tout le monde (la Pâque des Juifs était proche), en quoi il s’exposa à un grand péril : car non seulement il chassa les vendeurs, mais aussi il renversa leurs bureaux et jeta par terre leur argent, afin qu’ils pensassent en eux-mêmes que celui qui, pour la gloire du temple, s’exposait au péril, n’en méprisait pas le Maître. Si ce zèle qu’il faisait éclater eût été seulement feint et simulé, il s’en serait tenu à des remontrances et à des exhortations ; mais il se jette au milieu du danger : certes, l’action est hardie. En effet, ce n’était pas peu de chose que de s’exposer à la fureur de forains, de gens brutaux, comme étaient ces marchands ; d’outrager cette foule sans raison, et – de l’animer contre soi ; certes, on ne peut pas dire que ce fut là l’action d’une personne qui feint, qui déguise, mais bien d’un homme qui affronte toutes sortes de périls pour la gloire de la maison de Dieu. C’est pourquoi Jésus-Christ fait connaître son union avec le Père, non seulement par ses actions, mais encore par ses paroles ; car il n’a pas dit : la sainte maison, mais la maison de mon Père. Il appelle Dieu son Père, et ils ne s’en scandalisent point, ils ne s’en fâchent pas, c’est qu’ils croyaient alors qu’il le disait par simplicité. Mais lorsque dans la suite il parla plus clairement pour établir qu’il était égal au Père, ils se mirent en fureur.
Que dirent-ils donc ? « Par quel miracle nous montrez-vous que vous avez droit de faire de telles choses ? » O folie extrême ! Il