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4. Voyez, mes frères, comment la figure a été donnée par Moïse, et la vérité a été apportée par Jésus-Christ. Et encore : sur le mont Sinai, lorsque les Amalécites vinrent attaquer les Hébreux, les bras de Moïse étaient soutenus des deux côtés par Hor et Aaron (Ex. 17), mais Jésus-Christ a tenu lui-même ses mains étendues sur la croix. En quoi vous voyez comment la figure a été donnée et la vérité a été apportée. La loi disait : « Maudit quiconque ne demeure pas ferme dans ce qui « est écrit dans ce livre[1] ». (Deut. 27,26, LXX) Mais que dit la, grâce ? « Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et qui êtes chargés, et je vous soulagerai ». (Mt. 11,23) Et saint Paul : « Jésus-Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, s’étant rendu lui-même malédiction pour nous ». (Gal. 3,13) Puisque nous jouissons donc d’une si grande grâce, et de la vérité, je vous en conjure, mes chers frères, prenons garde que la grandeur de ce don ne nous rende plus lâches et plus paresseux. Plus est grand l’honneur que nous avons reçu, plus aussi doit être grande notre vertu. Celui qui, ayant peu reçu, rapporte peu, n’est pas beaucoup à blâmer mais on jugera digne du plus grand supplice celui qui, élevé au plus haut degré d’honneur, ne fait ensuite rien que de bas et de méprisable.
Mais, à Dieu ne plaise que nous ayons jamais à craindre pour vous rien de semblable : au contraire, nous avons dans le Seigneur cette ferme confiance que vos âmes, comme portées par des ailes, se sont absolument détachées de la terre et élevées jusque dans le ciel, et que, quoique vous demeuriez encore dans ce monde, vous ne vous occupez nullement de ce qui s’y passe. Toutefois, avec cette bonne confiance, nous ne cessons pas de vous réitérer souvent les mêmes avis. Ainsi, dans les combats publics, les spectateurs ne s’attachent qu’à encourager ces braves athlètes qui luttent et courent vaillamment, et ils ne disent mot à ceux qui se sont laissé renverser et jeter par terre ; ils savent que leurs exhortations n’auraient pas le pouvoir de relever ceux qui se sont une fois exclus de la victoire, et ne perdent point leur peine à les réprimander : ici, dans ces combats spirituels, il y a toujours à espérer, non seulement de vous qui veillez et vous tenez sur vos gardes, mais encore de ceux qui sont tombés, s’ils veulent se relever et changer de vie. Voilà donc pourquoi nous mettons tout en œuvre : nous usons de prières, d’exhortations, de reproches, de réprimandes, de louanges, pour opérer votre salut.
Ne trouvez donc pas mauvais qu’on vous exhorte souvent à mener une vie simple et honnête. Nos exhortations ne sont point des imputations de négligence ; elles attestent seulement les bonnes espérances que nous avons pour vous. Au reste, ce que nous disons et ce que nous avons encore à dire ne vous regarde pas seuls, mais nous aussi. Nous aussi, nous avons besoin des mêmes leçons : quoiqu’elles soient dans notre bouche, ce n’est pas à dire qu’elles ne nous regardent point. La prédication corrige le pécheur, et elle éloigne de plus en plus du péché l’homme de bien qui en est exempt. Et certes, nous-mêmes, nous ne sommes pas sans péché. La médecine nous est commune, les remèdes nous sont également offerts à tous, mais la guérison dépend de notre volonté. Celui qui use du remède comme il faut, recouvre la santé ; celui qui n’applique point de remède à sa plaie, augmente le mal et marche à sa ruine. Gardons-nous donc de murmurer du traitement : au contraire, il faut nous en réjouir, quand la prédication nous causerait d’amères douleurs le fruit n’en sera que plus délicieux. N’oublions, n’omettons rien, pour arriver à la vie éternelle, exempts des plaies et des blessures que les dents du péché font à l’âme ; afin que nous étant rendus dignes de paraître devant Jésus-Christ, nous ne soyons pas en ce terrible jour, livrés aux puissances cruelles et vengeresses, mais à celles qui nous introduiront dans l’héritage des cieux, qui est préparé pour ceux qui aiment Dieu. Je le prie de nous en faire part à nous tous, par la grâce et la miséricorde de Notre-Seigneur Jésus-Christ ; à qui soit, la gloire et l’empire dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.

  1. Autrement : Maudit celui quine demeure pas ferme dans les ordonnances de cette Loi. Vulg.