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HOMÉLIE XIII.

JEAN REND TÉMOIGNAGE DE LUI, ET IL CRIE, EN DISANT : VOICI CELUI DONT JE VOUS DISAIS, CELUI QUI DOIT VENIR APRÈS MOI, EST AVANT MOI, PARCE QU’IL EST PLUS ANCIEN QUE MOI. (VERSET 15)

ANALYSE.

  • 1. Le prédicateur ne perd point sa récompense par la paressé de ses auditeurs. Saint Jean l’évangéliste fait souvent valoir le témoignage de saint Jean-Baptiste, pourquoi ?
  • 2 et 3. Témoignage de saint Jean-Baptiste
  • 4. Rien de plus beau ni de plus brillant qu’une vie bien réglée.— Les dons faits de biens mal acquis sont rejetés.


1. Courons-nous en – vain ? est-ce inutilement fille nous travaillons ? Jetons-nous la semence sur des pierres ? Tombe-t-elle le, long du chemin ou demeure-t-elle cachée dans des épines[1]? J’ai peur, je tremble que mon labourage ne soit inutile, quoique d’ailleurs je ne puisse rien perdre de la récompense qui est attachée à ce travail. La condition du laboureur est autre que celle du prédicateur de la parole souvent le laboureur, après avoir travaillé toute une année, après avoir souffert tant de peines et de sueurs, ne récolte rien qui réponde à ses soins ; et alors rien ne peut plus le dédommager de ses peines ; triste et confus il revient de l’aire dans sa maison, auprès de sa femme et de ses enfants, et n’a personne à qui il puisse demander la récompense de ses longs travaux. Nous n’avons rien de pareil à craindre : quand bien même la terre que nous avons cultivée ne donne aucun fruit ; si nous avons employé tous nos soins et toutes nos peines, le Seigneur de la terre et du laboureur ne permettra pas que nous soyons frustrés de nos espérances, mais il nous donnera une rémunération. « Chacun », dit l’Écriture, « recevra sa récompense particulière selon son travail » (I. Cor. 3,8) ; et non pas selon l’événement. Pour preuve que cela est ainsi, écoutez ce que dit le Seigneur : « Vous donc, fils de l’homme, exhortez ce peuple, pour voir s’ils écouteront enfin et s’ils comprendront ». Et voici l’explication d’Ézéchiel : « Si la sentinelle », dit-il, « avertit de ce qu’il faut fuir et de ce qu’il faut suivre, elle a lié livré son âme, quoique personne ne l’écoute[2] ». (Ez. 2,5-6)
Toutefois ; encore que nous ayons cette ferme consolation, encore que nous soyons sûrs de la récompense, lorsque nous ne vous voyons pas profiter de nos instructions, nous ne sommes ni plus consolés ni en meilleure disposition que les laboureurs, qui gémissent et pleurent, qui sont honteux et confus ; Telle est la charité d’un prédicateur, telle est la sollicitude pastorale. Moïse pouvait se délivrer de l’ingrate nation des Juifs et obtenir un plus glorieux gouvernement, celui d’un peuple beaucoup plus nombreux. Dieu lui dit : « Laisse-moi faire, et je les exterminerai, et je t’établirai chef d’un plus grand peuple ». (Ex. 32,10) Mais comme il était saint et serviteur de Dieu ; comme il était vrai ami et homme de bien, il ne put même pas entendre cette parole ; au contraire, il aima mieux périr avec le peuple qui lui avait été confié, qu’être sauvé sans lui et élevé à une plus haute dignité. Tel doit être celui à qui est confié le soin dés âmes ; car si un père qui a de méchants enfants veut continuer néanmoins à être appelé leur père et ne consentirait point à en changer, il serait absurde que continuellement

  1. Allusion à la parabole des semences. Saint Mt. 13,1 ; saint Mc. 4, 1 ; saint Lc. 8,4.
  2. On ne lit point ces deux passages, ni dans les Septante, ni dans la Vulgate. L’auteur en prend seulement le sens.