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 puisque c’est du Fils qu’il est ici parlé ? mais c’est d’un Dieu que nous parlons, et vous dites : comment cela se peut-il ? Et vous ne craignez pas, ou plutôt vous n’avez pas horreur de faire une pareille demande ? mais si quelqu’un vous demande comment les âmes et les corps jouiront un jour d’une vie immortelle, vous vous mettez à rire, parce que, direz-vous, il n’est pas de l’esprit humain de raisonner en ces matières, mais seulement de croire : ni d’examiner curieusement la parole, mais de tenir pour une démonstration suffisante la toute-puissance de celui qui parle : et si : nous vous disons que Celui qui a créé les âmes et les corps, et qui est sans comparaison au-dessus de toutes les créatures, n’a point de commencement, vous oserez nous demander comment cela se peut ? Est-ce le fait d’une âme rassise, d’un esprit droit ?
Vous avez entendu cette parole : « Celui-là était la vraie lumière ». Pourquoi tant de vains et d’inutiles efforts pour comprendre par la seule raison une vie qui n’a point de fin ? Pourquoi chercher à connaître ce qui ne peut être connu ? Pourquoi sonder ce qui est incompréhensible ? Pourquoi soumettre à un examen ce qui échappe à tout examen ? Cherchez à remonter à l’origine des rayons du soleil, vous ne la trouverez point, et toutefois, vous ne serez ni fâché, ni chagrin de votre incapacité. Pourquoi donc seriez-vous téméraires et inconsidérés dans de plus grandes choses ?
Jean cet enfant du tonnerre, ce héraut spirituel, au moment où l’Esprit-Saint lui a fait entendre cette parole : « Il était », s’est tu et n’a point cherché à approfondir davantage : et vous, qui n’avez pas reçu de si grandes grâces, vous qui ne parlez que suivant les faibles lumières de votre raison, vous voulez en savoir plus que lui ? Voilà pourquoi vous n’atteindrez jamais degré même de connaissance où il est parvenu.
C’est ainsi que procède le diable : « il fait passer à ceux qui l’écoutent et lui obéissent les limites que Dieu nous, a prescrites, comme si nous pouvions aller beaucoup plus loin : mais après nous avoir fait pendre la grâce du Seigneur par les appâts de cette belle espérance, non seulement il ne fait rien de plus pour nous, car comment le ferait-il, puisqu’il est le diable ? mais il ne nous permet même pas de revenir à ce premier état, où nous étions en paix et en sûreté ; il nous : fait au contraire errer de côté et d’autre, sans que nous puissions jamais nous fixer.
C’est ainsi qu’il a chassé notre premier père du paradis. Il enfla son cœur de l’espérance d’une plus grande science et de plus grands honneurs, et lui fit perdre ainsi ceux dont il jouissait paisiblement : non seulement Adam ne devint pas semblable à Dieu, comme il le, lui faisait espérer, mais il le soumit au tyrannique empire de la mort : non seulement Adam n’apprit rien pour avoir mangé du fruit de l’arbre défendu, mais encore il ne perdit pas peu de cette science qu’il avait, pour en avoir espéré une plus grande : car dans ce moment il commença à rougir de sa nudité, honte à laquelle il avait été supérieur jusqu’à sa faute. Donc la connaissance de sa nudité, le besoin où il fut désormais de se vêtir, ces malheurs et plusieurs autres furent une conséquence de sa curiosité.
Mais de peur qu’il ne nous en arrive autant, mes frères, soyons obéissants à Dieu, et gardons ses commandements : ne cherchons pas curieusement à approfondir davantage, pour ne pas perdre comme eux les grâces que nous avons reçues. Les hérétiques voulant chercher un commencement dans cette vie qui n’a point de commencement ; ont perdu avec cette connaissance qu’ils n’auront jamais, celles qu’ils auraient pu acquérir. En effet, ils n’ont point trouvé ce qu’ils cherchaient, car ils ne le pouvaient pas, et ils ont perdu la vraie foi au Fils unique.
Pour nous ne sortons point des anciennes bornes que nos pères ont posées, et soyons soumis en tout aux lois que l’Esprit-Saint nous a tracées. Lorsque nous entendons : « Il était a la vraie lumière », ne cherchons rien de plus, nous ne pouvons en savoir davantage, ni atteindre plus haut. Si Dieu avait engendré son Fils comme les hommes engendrent, il y aurait nécessairement quelque espace de temps entre celui qui engendre et celui qui est engendré : mais puisqu’il l’a engendré d’une manière ineffable, propre et convenable à un Dieu, cessons de nous servir de ces expressions : « Avant » et « Après », car ce sont là des noms qui appartiennent au temps : mais le Fils est le créateur même de tous les siècles.
2. Il n’est donc pas son Père, direz-vous, mais son frère. Où est-elle, je vous prie, cette nécessité ? Si nous disions que le Père et le Fils