Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/132

Cette page n’a pas encore été corrigée

ajoute encore : « Un homme a été envoyé de Dieu, pour rendre témoignage à la lumière ». Il faut bien qu’ils répondent que cela est dit aussi du Saint-Esprit ; car celui-là même qu’il a nommé « Verbe » ci-dessus, il le qualifie « Dieu, vie et lumière » dans les paroles suivantes : « Ce Verbe », dit-il, « était la vie », et cette même vie « était la lumière ». Si donc le Verbe était la vie, et si le Verbe qui est la vie, s’est fait chair, la vie s’est fait chair, c’est-à-dire le Verbe : « Et nous avons vu sa gloire, comme du Fils unique du Père ».
Si ces hérétiques soutiennent donc qu’en cet endroit le Saint-Esprit est appelé la vie, voyez combien il s’ensuit d’absurdités : il résulte delà que c’est le Saint-Esprit qui s’est incarné, et non pas le Fils ; que le Saint-Esprit est le Fils unique. Et si cela n’est point ainsi, ou s’ils veulent éviter ces conséquences, ils tomberont dans de plus grandes extravagances, en lisant comme ils font. S’ils avouent que c’est du Fils qu’il est parlé en ce lieu et s’ils ne ponctuent pas et ne lisent pas comme nous, il faut nécessairement qu’ils disent que le Fils a été fait par lui-même. En effet, si le Verbe était la vie, si ce qui a été fait, était vie en lui : de cette façon de lire il s’ensuit que le Verbe a été fait en lui-même, et par lui-même. L’Évangile ajoute ensuite quelques lignes après : « Et nous avons vu sa gloire, sa gloire », dis-je « comme du Fils unique du Père (14) ». Voilà comment de leur façon de lire, et de leur manière de s’expliquer, il résulte que le Saint-Esprit est le Fils unique ; car « selon eux », c’est de l’Esprit-Saint qu’il est uniquement parlé, c’est à lui seul que se rapporte tout ce discours.
Ici, mes frères, ne voyez-vous pas dans quels précipices, et dans quelles absurdités on tombe, lorsqu’une fois on s’égare et l’on s’écarte de la vérité ? Quoi donc ? L’Esprit-Saint, direz-vous, n’est-il pas la lumière ? Oui, il est sûr qu’il est la lumière ; mais il n’est point fait mention de lui en cet endroit. Quoique Dieu soit Esprit, c’est-à-dire incorporel, il ne s’ensuit pourtant pas de là que toutes les fois qu’on dit esprit, ce soit de Dieu qu’on parle. Et pourquoi vous étonneriez-vous, si nous le disions du Père ? Du Paraclet, du Consolateur même, nous ne dirons pas que partout où l’on trouve le nom d’esprit, ce soit de l’Esprit Consolateur qu’on parle : quoique ce nom lui soit propre, et celui qui lui convient le plus, toutefois partout où on lit le nom d’esprit, il ne faut pas toujours l’entendre du Paraclet ; car Jésus-Christ aussi est appelé la vertu de Dieu, la sagesse de Dieu. Mais partout où on nomme la vertu de Dieu, la sagesse de Dieu, ce n’est pas toujours de lui qu’on parle. Il en est de même en ce' lieu : quoique le Saint-Esprit illumine, ce n’est pas néanmoins de lui que parle maintenant l’évangéliste. Mais nous avons beau faire justice de ces absurdités : eux, dans leur extrême obstination à combattre la vérité, ne cessent point de dire : « Ce qui a été fait, était vie en lui », c’est-à-dire, ce qui a été fait était vie.
Quoi donc ? le châtiment des Sodomites, le déluge, les tourments, et mille autres choses semblables, tout cela était vie ? Mais, disent-ils, nous parlons de la création. Certes, ces choses appartiennent à la création. Mais pour combattre plus fortement encore leurs sentiments, interrogeons-les : dites-nous donc, le bois est-il vie ? Les pierres, ces êtres inanimés et sans mouvement, sont-ils vie ? l’homme lui-même, est-il absolument vie ? Qui pourrait le prétendre ? L’homme n’est point la vie, mais capable de vie.
2. Considérez encore ici leurs absurdités, car nous les suivrons pas à pas, pour mettre leur folie dans un plus grand jour ; tant nous sommes sûrs qu’ils n’allèguent rien qui puisse convenir au Saint-Esprit ! En effet, forcés dans leurs retranchements, et contraints d’abandonner leurs premières opinions, ils appliquent aux hommes ce qu’ils croyaient auparavant pouvoir dignement attribuer à l’Esprit-Saint ; mais examinons maintenant leur leçon dans ce nouveau sens.
La créature est à présent appelée vie, elle est donc aussi la lumière : et Jean est venu pour lui rendre témoignage. Pourquoi donc n’est-il pas lui-même la lumière ? L’Écriture dit : « Il n’était pas la lumière » ; cependant il était du nombre des créatures : comment n’est-il donc pas la lumière ? Et comment expliquer : « Il était dans le monde, et le monde a été fait par lui ? » La créature était dans la créature, et la créature a été faite par la créature : comment le monde ne l’a-t-il point connu ? Est-ce que la créature n’a point connu la créature ? « Mais il a donné à tous ceux qui l’ont reçu le pouvoir d’être faits enfants de Dieu ». Mais en voilà assez pour faire rire tout le monde de leurs impertinences ; ce sera maintenant à vous