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d’exposer que ces Demi-Ariens ne différaient des catholiques que dans les paroles et dans les expressions, et qu’ils étaient au fond de même sentiment. Aussi saint Athanase ne faisait pas difficulté de dire qu’il espérait que bientôt ils se réuniraient tout à fait à l’Église, et par l’unité de foi, et par l’unité d’expressions et de langage, usant de la même formule de foi. Et c’est ce qui arriva dans la suite, etc.
Comme donc ces Semi-Ariens étaient au fond réellement d’accord avec les catholiques, de même aussi les autres Semi-Ariens qui enseignaient que le Fils avait été tiré et fait du néant, et qu’il n’était point coéternel au Père, encore qu’ils le disent « Homoiousion », c’est-à-dire, semblable au Père en substance, étaient peu ou point du tout différents des Ariens, et de ceux qui soutenaient que le Fils était « Anomoion », c’est-à-dire, dissemblable au Père : c’est pourquoi ces Semi-Ariens ne furent pas longtemps séparés des Ariens et des Anoméens, et ils furent enfin presque tous appelés « Anoméens », comme je le crois, dit le Révérend Père Dom Bernard de Montfaucon, que nous suivons dans cette histoire des Ariens et de leurs sectateurs.
Les historiens rapportent qu’Aétius fut l’auteur et le chef de ces nouveaux Anoméens qui s’élevèrent alors : cet Aétius que son impiété fit surnommer ATHÉE. Ils commencèrent à troubler l’Église dès le temps de saint Athanase, disant que le Fils était tout à fait dissemblable au Père ; en quoi ils s’accordaient parfaitement avec Arius et avec les Ariens. Car dès lors qu’ils tenaient que le Fils était créé et fait du néant, il s’ensuivait sûrement de leur impie doctrine, qu’il y avait autant de différence entre le Père et le Fils, qu’il y en a entre le Créateur et la créature ; et qu’y ayant une distance immense entre le Créateur et la créature, il y en avait une de même entre le Père et le Fils. Ils disaient donc le Christ « Anomoion », dissemblable, d’où ils furent appelés « Anoméens ».
Saint Chrysostome, ayant commencé à prêcher l’an 386, trouva la ville d’Antioche entièrement inondée et infectée de ces abominables Anoméens : ce qui l’engagea à composer contre eux les douze Homélies de « l’incompréhensibilité de Dieu » ; et dès cette année et dans les suivantes il les réfuta par des preuves et des raisonnements également pleins de feu, de force et d’éloquence. Car ces Anoméens embrassaient tous les dogmes des Ariens, et les soutenaient, y ajoutant encore beaucoup d’autres blasphèmes et d’autres impertinences, que le saint Docteur leur reproche à tous moments. Ils se vantaient insolemment d’une science universelle, comme nous l’avons déjà remarqué, et de connaître Dieu aussi parfaitement que Dieu se tonnait lui-même : pouvait-on rien entendre de plus absurde et de plus insensé ! Mais c’en est assez et même trop. Car nous déclarons, avec le pieux auteur des Mémoires sur l’histoire Ecclésiastique [1], que c’est avec horreur et avec regret que nous osons écrire ces blasphèmes, qui ont fait frémir tous les saints évêques dans le concile de Nicée. Et nous pouvons dire, avec saint Athanase, que c’est la seule nécessité de notre sujet qui nous empêche de les supprimer. Quoique dans ses discours le Saint ne cesse point d’attaquer les Anoméens, qu’il nomme rarement par leur nom d’Anoméens, toutefois il ne cite et ne réfute jamais plus particulièrement leurs arguments, que « dans ces Homélies sur l’Évangile de saint Jean ». C’est pourquoi, pour en faciliter la lecture et en donner une plus claire intelligence, il est à propos d’exposer ici au moins une partie des textes sur lesquels ils prétendaient s’appuyer et établir leurs dogmes impies.

Preuves et arguments des Anoméens. – Réponses et réfutations de saint Chrysostome.


Il parait que les Anoméens, qui sont sortis des Ariens, se distinguaient particulièrement d’eux, et se caractérisaient par l’impertinente vanité de s’attribuer une science universelle, et d’assurer qu’ils connaissaient Dieu aussi parfaitement que Dieu les connaissait eux-mêmes, et qu’il se connaissait lui-même : ce qui était également fou et impie. Enflés de cette science imaginaire, ils se croyaient forts, et partout ils attaquaient hardiment les catholiques, qui les réfutaient principalement par l’Évangile de saint Jean et tiraient de ce divin arsenal les traits dont ils se servaient pour les repousser et les abattre : les Anoméens en tiraient aussi du même Évangile pour les écarter et les détourner. Ces impies étaient extrêmement chagrins et piqués de ce qu’on renversait leurs dogmes par ces paroles du sublime Théologien : LE VERBE ÉTAIT DIEU : MON PÈRE ET MOI NOUS SOMMES UNE MÊME CHOSE : JE SUIS DANS MON PÈRE, ET MON PÈRE EST EN MOI : AFIN QUE TOUS HONORENT LE PÈRE, COMME ILS HONORENT LE FILS : COMME MON PÈRE ME CONNAÎT, JE CONNAIS MON PÈRE : CELUI QUI ME VOIT, VOIT MON PÈRE : SI VOUS M’AVIEZ CONNU, VOUS AURIEZ AUSSI CONNU MON PÈRE ; et par d’autres semblables, par lesquels Jésus-Christ déclare qu’il est un avec son Père, de la même substance, égal à lui, et vrai Dieu. Ces hérétiques donc, pour se défendre, tâchaient de tirer aussi des preuves et des arguments du même texte de saint Jean

  1. Tillemont