est un moindre mal que l’obstination à la suite du péché. David se conduisit bien autrement : après les reproches de Nathan au sujet de Bersabée : « J’ai péché », dit-i1, « contre le Seigneur. » (2Sa. 12,13)
3. Voyez-vous la contrition de ce cœur ? Voyez-vous l’humilité de cette âme ? Voyez-vous comment les saints trouvent des sujets de gloire jusque dans leurs chutes. De même que les beaux corps, jusque dans la maladie, offrent encore à nos regards de nombreux vestiges de beauté : ainsi les âmes des saints conservent dans leur chute même, la marque de la vertu qui leur est propre. Cependant David avait reçu les reproches du Prophète au milieu de son palais, en présence d’une assistance nombreuse : Ozias recevait ceux du prêtre au fond dit sanctuaire, et sans témoins : néanmoins il n’endura point cette réprimande. Eh bien ! il demeura donc incurable ? Nullement, la bonté de Dieu s’y opposa. Rappelez-vous l’histoire du lunatique que les disciples n’avaient pu délivrer du démon qui le possédait : « Apportez-le-moi ici », dit le Christ. (Mt. 17,16) De même ici, dans l’impuissance du prêtre à triompher d’une maladie plus dangereuse que le plus impitoyable démon, Dieu lui-même se charge du malade. Et que fait-il ? Il lui fait venir une lèpre sur le front. « Il arriva, pendant qu’il menaçait le prêtre qu’une lèpre lui vint sur le front. » Après cela, pareil à ces hommes que l’on traîne au supplice avec une corde entre les dents, en signe du jugement qui les condamne, Ozias s’éloigna, avec la marque d’infamie sur le front, sans qu’il fût besoin de bourreaux pour l’entraîner ; la lèpre elle-même était comme le bourreau qui le poussait violemment dehors. Il était entré pour usurper le sacerdoce ; il perdit jusqu’à la royauté : il était entré pour accroître sa majesté, c’est son impureté qu’il accrut. Sa souillure, en effet, le mettait au-dessous du dernier de ses sujets. Tant il est funeste de ne pas savoir demeurer entre les bornes que Dieu nous a prescrites, soit qu’il s’agisse de dignités ou de science ! Voyez-vous cette mer qui se déchaîne avec une indomptable impétuosité et soulève d’énormes vagues ? Néanmoins, quelle que soit la hauteur de ses flots, et la fureur rte ses mouvements, elle ne sera pas plus tôt arrivée à la borne que Dieu lui a posée, que ses vagues se résoudront en écume, et qu’elle rentrera dans son lit. Et pourtant quoi de plus faible ? Mais ce n’est pas le sable qui l’arrête, c’est la crainte de Celui qui a posé cette barrière. Que si cet exemple ne vous corrige pas, instruisez-vous en considérant l’histoire d’Ozias, en écoutant nos paroles.
Mais puisque nous avons assisté à la colère de Dieu, et à ses justes représailles, il est temps de faire voir sa bonté, son infinie douceur. Car il ne faut point parler de la colère seulement, mais encore de la bonté, si l’on ne veut pas plus jeter ses auditeurs dans le désespoir que dans lé relâchement. Telle est la conduite de Paul : il fait entrer ces deux éléments dans ses exhortations : « Voyez », dit-il, « la bonté et la sévérité de Dieu (Rom. 11,22) », afin de faire concourir et la crainte et l’espérance à relever le pécheur. La sévérité de Dieu, vous l’avez vue : voyez maintenant sa bonté. Comment nous la représenterons-nous, si nous examinons quel châtiment méritait Ozias ? Quel châtiment méritait-il donc? Mille coups de foudre, le supplice, le châtiment suprême, du moment où il avait osé, dans l’excès de son impudence, franchir l’enceinte consacrée. En effet, si les premiers auteurs d’un pareil attentat avaient été punis de la sorte, je veux dire Dathan, Coré et Abiron, à plus forte raison le même supplice devait-il être infligé à ce nouveau coupable, que le malheur d’autrui n’avait pu corriger. Mais Dieu ne le voulut pas : il commença par lui faire les représentations tes plus modérées par la bouche du prêtre. Ce que le Christ prescrit aux hommes de faire à l’égard de ceux qui les offensent. Dieu le fait ici pour un homme. « Si ton frère a péché contre toi », est-il écrit, « va et reprends-le entre toi et lui seul. » C’est ainsi que Dieu s’y prit pour réprimander ce roi. Le Christ ajoute : « S’il ne t’écoute point, qu’il te soit comme un païen et un publicain. » (Mt. 17,15 et 17) Mais Dieu, transgressant par bonté ses propres lois, ne rejette pas Ozias malgré sa résistance et sa rébellion : il continue à le rappeler à lui, et l’instruit par un châtiment qui est plutôt encore une correction. Il ne lança point sa foudre du haut du ciel, il ne réduisit point en cendres cette tête éhontée, il se contenta de lui envoyer la lèpre en guise d’avertissement. Voilà pour ce qui concerne Ozias. Je n’ajoute plus qu’une remarque avant de clore ce discours.
De quoi s’agit-il ? De ce que nous voulions savoir tout d’abord. Pourquoi, lorsque c’est
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