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l’harmonie : c’est d’en haut qu’il tient la beauté de ses mélodies ; c’est la Trinité qui le fait vibrer, comme l’instrument touché par la verge d’ivoire, et lui fait rendre ces modulations délicieuses et célestes, ces chants angéliques, cette éternelle symphonie. Voilà le résultat de notre empressement à l’Église, voilà le fruit de nos réunions ? Voilà pourquoi je me réjouis en considérant l’éclat de cette solennité ; je me réjouis en voyant ce bonheur qui remplit vos âmes, cette joie spirituelle, cette allégresse selon Dieu. Car rien ne répand autant de charme sur notre vie, que le contentement que nous goûtons à l’église. A l’église se conserve la joie de ceux qui sont dans la joie : à l’église se trouve le bonheur pour les affligés ; à l’église la gaîté pour les souffrants ; à l’église le rafraîchissement pour ceux qui sont las ; à l’église le repos pour ceux qui succombent. « Venez ici près de moi, est-il écrit, vous tous qui êtes fatigués et accablés ; et je vous donnerai le repos. » (Mt. 2,28) Quoi de plus aimable que cette parole ? de plus doux que cet appel ? C’est à un festin que le Maître vous appelle, en vous appelant à l’église, c’est au repos qu’il vous convie en place de vos fatigues, c’est en récréation qu’il change vos peines, alors qu’il allège le faix de vos péchés ; les délices triomphent de votre chagrin, la gaîté guérit votre douleur d’ineffable sollicitude ! ô appel céleste ! Hâtons-nous donc, mes chers frères, de montrer encore un redoublement d’ardeur, et en même temps, de ne point perdre de vue, en contentant notre zèle, les règles de la convenance et le but que nous devons nous proposer. C’est le sujet dont je veux aujourd’hui vous entretenir : sujet déplaisant en apparence, mais utile en réalité bien loin qu’il doive vous paraître importun. Ainsi agissent les pères qui chérissent leurs enfants : ils ne s’occupent pas seulement de leur procurer des plaisirs d’un instant, ils ne craignent pas quelquefois de leur faire de la peine : ils ne se bornent pas à leur recommander les pratiques dont l’utilité est manifeste d’elle-même celles même qui paraissent gênantes, mais auxquelles il est salutaire de se conformer, ils les leur enseignent avec une grande sollicitude, et exigent d’eux qu’ils les observent exactement. Que si nous prolongeons ce préambule, c’est pour que la peine que nous prenons ici ne soit pas perdue, c’est pour ne pas nous consumer en luttes et en veilles inutiles, c’est pour que nos paroles ne se perdent pas dans l’air après avoir retenti plutôt à notre détriment qu’à notre profit. En effet, le marchand qui part pour de lointains voyages, qui affronte tous les efforts des vents et tous les soulèvements des vagues, ne se résignerait pas à s’exposer en pure perte à de pareilles épreuves : s’il fend les vagues, s’il brave les périls, s’il change de lieu sans cesse, s’il passe toutes ses nuits sans dormir, c’est pour que son trafic l’enrichisse. De telle sorte que si, loin de trouver de l’avantage et de retirer un gain, il est encore menacé de perdre son capital, il est impossible qu’il lève l’ancre et coure se jeter au milieu de ces innombrables périls.
2. Convaincus de ces vérités, entrons ici avec le respect convenable, si nous ne voulons au lieu d’obtenir la rémission de nos péchés, revenir chez nous chargés de péchés nouveaux. – Qu’est-ce donc qui est demandé, exigé tic nous ? C’est lorsque nous chantons les hymnes divins, d’offrir cet hommage avec un sentiment de crainte profonde et un extérieur qui respire la piété. En effet, il y a ici des personnes, lesquelles, je le pense, ne sont pas inconnues à votre charité, qui manquent de respect à l’égard de Dieu, et ne voyant dans les paroles de l’Esprit que des propos vulgaires, poussent des cris désordonnés et se conduisent véritablement comme des insensés, à voir l’agitation, les mouvements en tout sens de toute leur personne et dénotent par là des dispositions Lien différentes d’un état vraiment spirituel. Malheureux, infortuné que tu es ! Quand c’est avec crainte et tremblement que tu devrais mêler ta voix aux louanges angéliques, quand c’est en frissonnant que tu devrais faire ta confession au Créateur afin d’obtenir par ce moyen le pardon de tes fautes, voici que tu transportes en ce lieu les postures des mimes et des danseuses, comme eux agitant les bras au mépris des bienséances, trépignant des pieds et disloquant ton corps par mille contorsions. Et comment n’éprouves-tu ni crainte ni effroi en bravant ainsi la sainte parole ? ne songes-tu pas que Dieu lui-même est ici, invisible et présent, qu’il surveille les mouvements de chacun, qu’il lit dans sa conscience ? Ne songes-tu pas que des anges assistent à ce redoutable banquet, et entourent cette table tout pénétrés de crainte ? mais non, tu ne songes point à cela, parce que les propos et les spectacles du théâtre ont fait la nuit dans ta pensée ; voilà pourquoi