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Les hommes suivent tantôt la bonté, tantôt la perversité, la colère ; Dieu, par des moyens différents, ne révèle jamais que sa bonté. Il faut donc également le louer d’avoir mis Adam dans le paradis et de l’en avoir chassé ; il faut lui rendre grâces, non seulement pour la royauté qu’il nous destine, mais aussi pour l’enfer ; car s’il l’a fait, s’il nous en menace, c’est pour nous affranchir du vice. En effet, si nous remercions le médecin, non seulement quand il nous permet la nourriture, mais quand il nous impose les tourments de la faim, non seulement quand il nous envoie en promenade sur la place publique, mais quand il nous tient chez nous, enfermés ; non seulement quand il nous frictionne, mais quand il brûle et ampute nos membres, parce que si les traitements sont différents, c’est toujours la même fin qu’il se propose ; de même il faut louer Dieu pour tout ce qu’il fait et il faut le louer beaucoup plus encore, parce que c’est Dieu ; le médecin n’est qu’un homme et souvent le résultat trompe le médecin ; mais ce que Dieu fait témoigne de la plus sage sollicitude. Et, voyez maintenant : la grêle et le feu n’ont pas été seulement des instruments de supplices, mais la grêle et le feu ont affranchi du supplice, ont terminé des guerres, ont repoussé des invasions ennemies. Ignorez-vous les prodiges accomplis par le moyen de ces éléments, et en Égypte, et dans la Judée, et au milieu de notre génération ? Et la puissance de Celui qui commande est si grande, que les œuvres qu’il accomplit par ses anges, par des créatures spirituelles, par de grandes puissances, il lui arrive souvent de les accomplir par le moyen des éléments, d’une manière admirable. Ce que Dieu fait, afin que l’insensé n’attribue pas les œuvres à l’ange, mais à Celui qui lui a commandé. Un ange a mis fin à une guerre ? la grêle en a fait autant. Un ange a exterminé les premiers-nés des Égyptiens ? La mer en fureur, elle aussi, a exterminé tout un peuple. Donc, pour toutes ces merveilles, rendez grâces au Dieu de bonté. « Vous, montagnes, et toutes les collines, arbres fruitiers et tous les cèdres ; vous, bêtes sauvages, et tous les autres animaux ; vous reptiles, et vous, oiseaux qui avez des ailes. » Voyez-vous la complaisance avec laquelle il s’arrête sur les êtres inutiles, les montagnes, les bois, les collines, les animaux, les reptiles, les arbres stériles ? Les arbres fruitiers montrent d’eux-mêmes leur utilité, de même que les plaines et les animaux d’un caractère doux ; mais les bêtes féroces, les serpents, les montagnes, les arbres stériles, dira-t-on, quelle utilité présentent-ils ? Une très-grande assurément et qui répond pour nous à de grands besoins, car les montagnes, et les collines, et les arbres stériles nous sont très-précieux, pour nous fournir des matériaux de construction. Si ces matériaux nous manquaient, notre race périrait ; de même donc que nous avons besoin de champs cultivés pour en tirer nos aliments, de même nous avons besoin de bois stériles et de pierres pour construire nos maisons et pour mille autres usages.
4. Mais les serpents, dira-t-on, les scorpions, les dragons, les lions, à quoi cela sert-il ? quelle en est l’utilité ? immense, inexprimable, aussi précieuse que celle que nous retirons des animaux apprivoisés. Ceux-ci nous sont utiles, à titre de serviteurs ; les autres vous inspirent la crainte, pour vous apprendre la modération ; pour vous exercer à la lutte ; pour vous rappeler la faute de votre premier père ; pour vous montrer les déplorables suites de la désobéissance. En effet, ces animaux n’étaient pas, dès le principe, terribles pour l’homme ; l’homme n’avait pas de raison pour les fuir ; ils étaient doux et apprivoisés ; tel était leur caractère, lorsque Dieu les conduisit auprès d’Adam, lorsque Adam leur donna leurs noms. Le serpent adresse la parole à la femme ; Eve ne s’en détourne pas avec horreur ; mais une fois que le commandement du Seigneur eut été transgressé, une fois que l’homme eut désobéi à Dieu, l’homme perdit la plus grande partie de ses glorieux privilèges. Donc, à la vue d’un lion, à la vue d’un serpent, rappelez-vous l’enseignement sacré, et ce spectacle sera pour vous une éloquente leçon de sagesse ; rappelez-vous aussi Daniel ; quand son âme eut reconquis l’antique innocence, il méprisa ces animaux qui inspirent la terreur. Paul, de même, méprisa la vipère. (Act. 28) Ces souvenirs réveilleront votre zèle, votre application.
Nous pouvons d’ailleurs admirer encore ici une autre preuve de la sagesse avec laquelle Dieu a disposé les choses. Quelle est-elle ? c’est que Dieu a fixé à ces animaux des résidences loin des villes, à savoir, les solitudes ; ils sont terribles et ils ne séjournent pas dans les cités ; ils ne s’élancent pas sur les hommes qui les