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à la longue, de peur que, délivrés trop promptement de leurs maux ils ne retombassent dans leurs premiers égarements. Et puis, à mesure qu’il leur accordait ses biens, il les avertissait fréquemment, en réveillant de temps en temps leur torpeur par les attaques de l’ennemi. Par conséquent, ce qui est dit ici ne doit pas être restreint au cas particulier dont il s’agit, hais il faut y voir un principe général qui s’applique à tout, et en conclure que dans les événements de la vie, nous ne devons jamais être lâches ni nous laisser abattre, mais faire tous nos efforts et ensuite nous abandonner complètement à la volonté du Seigneur, plaçant en lui toutes nos espérances. De même que sans l’aide de Dieu nous ne pourrons réussir en rien, ainsi notre négligence et notre lâcheté paralyseront son assistance au point de nous empêcher d’arriver à nos fins. « C’est en vain que vous vous levez avant le jour pour vous enrichir par votre travail. Levez-vous après que vous vous serez reposés. » Un autre interprète dit : « C’est en vain que vous attendez pour vous reposer », et un troisième : « Que vous différez de vous reposer. » Ce qui revient à dire : malgré votre vigilance, quoique vous vous leviez de grand matin et que vous vous couchiez fort lard, passant tout votre temps à travailler et à souffrir, sans le secours d’en haut, tous ces efforts purement humains n’aboutiront à rien, et toute cette application, toute cette peine seront sans fruit.
« Vous qui mangez d’un pain de douleur. » Ces dernières paroles nous font voir combien pénible est la vie des Juifs qui sont obligés d’être sous les armes pour bâtir. C’est qu’en effet, d’une main ils portaient la corbeille ou la pierre et de l’autre le glaive, obligés qu’ils étaient de se partager pour travailler et pour combattre et de joindre des armes à leurs instruments de travail. Car la ville était sans fortifications et par conséquent à découvert, ils craignaient à chaque instant les attaques de l’ennemi. C’est pourquoi ils se tenaient sous les armes, pour élever leurs murs, tout prêts à saisir le glaive ou l’épée au cas où les sentinelles avancées donneraient le signal d’une irruption soudaine en sonnant de la trompette aussitôt qu’ils verraient un mouvement. Mais malgré tant de précautions, ajoute le Psalmiste, quand même vous « mangeriez le pain de la douleur », vos efforts seront inutiles à moins que vous n’attiriez sur vous la protection divine. Que si, pour relever une ville et der murailles, l’assistance du Seigneur était si indispensable, quel besoin plus grand n’en avons-nous pas, nous qui voulons parcourir la voie qui conduit au ciel ? car « après le sommeil qu’il aura donné à ses bien-aimés ils verront naître des enfants qui seront comme un héritage et un don du Seigneur (3). » Que signifie cette conclusion ? – Elle est admirable et bien en harmonie avec ce qui précède, car elle revient à ceci : sans l’aide de Dieu rien ne subsiste ; mais qu’il paraisse, il apporte avec lui, le sommeil agréable, le repos, la vie exempte de périls et pleine de sécurité.
2. Lors donc que Dieu aura donné le repos à ses enfants, quand il aura réparé leurs forces, repoussé cens qui les attaquaient, non seulement ils pourront bâtir leur ville et la garder, mais ils recevront des biens infiniment plus importants : ils deviendront les pères de nombreux enfants, et leur postérité croîtra brillante. Et ainsi « le fruit de leurs entrailles sera la récompense de leurs travaux », ou bien « leur récompense sera la fécondité du sein de la mère. » En d’autres termes, ils recevront en récompense une postérité nombreuse. Car bien que ce soit là une chose qui paraisse toute naturelle, quand Dieu s’en mêle, elle réussit mieux ; le secours d’en haut lui est même indispensable, et c’est la condition pour que Jérusalem soit peuplée d’habitants. Mais tout leur bonheur consistera-t-il à élever une ville, à la bien garder, à posséder une postérité nombreuse ? – Non, car à ces biens viendront s’en ajouter d’autres que le Psalmiste nous indique dans les paroles suivantes : « Telles sont les flèches dans la main d’un homme fort, tels sont les enfants de ceux qui ont été éprouvés par l’affliction », ou, selon une autre version, par la captivité : » Ce qui revient à dire : non seulement ils seront en sûreté derrière leurs murailles, et dans l’intérieur de leur ville fortifiée, non seulement leur postérité sera nombreuse, mais, de plus, ils seront terribles pour leurs ennemis et redoutables comme des flèches. Et remarquez qu’ils ne sont pas comparés simplement à des flèches, mais « à des flèches dans la main des forts. » Les flèches en effet ne sont pas terribles par elles-mêmes, et c’est seulement quand elles sont lancées par un bras vigoureux qu’elles portent la mort où elles sont dirigées. C’est donc ainsi qu’ils seront