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volonté de Dieu. La nature est l’œuvre de cette même volonté qui dispose et organise toute la création à son gré, et qui, tantôt conserve immobile les limites qu’elle lui a posées, tantôt les déplace facilement, selon qu’il lui plaît, et renverse l’ordre naturel des choses. « Les œuvres ont été méditées de manière à satisfaire toutes ses volontés », c’est-à-dire de manière à réaliser tous ses ordres et tous ses commandements, et non seulement de manière à réaliser ses commandements, mais encore de manière à le faire connaître des hommes, car c’est là l’objet de sa volonté, c’est surtout dans ce but qu’il a fait tout cela. Ce que dit le Prophète revient donc à ceci, que les œuvres de Dieu sont disposées de telle sorte que les hommes attentifs et de bon sens reconnaissent qu’elles révèlent avec beaucoup de netteté, d’évidence et de clarté l’existence de Dieu à l’intelligence humaine. C’est surtout dans ce but que Dieu a disposé toutes choses dès le principe, afin qu’en voyant la grandeur, la beauté et l’ordre de la création, en voyant marcher et fonctionner toutes choses avec régularité, l’âme du spectateur s’émût, et que son intelligence s’éveillât à la recherche du Créateur et de l’architecte suprême, à la recherche de Dieu, et qu’elle adorât celui qui a fait ces choses, et qu’elle lût le secret de son existence dans la création, comme dans un livre. Le spectacle de la création nous est très-utile non seulement pour arriver à la connaissance de Dieu, mais encore pour régler notre conduite. L’homme cupide, en voyant le jour céder la place à la nuit, et le soleil à la lune, aura honte de ne pas imiter le bon ordre qui règne parmi les éléments, et, fût-il le plus fort, il ne convoitera pas les biens de ceux qui sont plus faibles : l’adultère et le débauché, en voyant la mer d’abord furieuse se calmer en approchant du rivage, rougiront à leur tour de ne pas imiter le bon ordre qui règne parmi les flots, ils pourront refréner promptement l’excès de leur passion, arrêter par la crainte du Christ l’élan qui les emporte, dissiper toute cette écume des désirs impurs, et se soumettre au frein de la chasteté. Si nous jetons les yeux sur la terre ferme, nous pourrons y trouver facilement d’utiles sujets de méditation, surtout pour ce qui concerne le mystère de la résurrection, et nous pourrons admettre ce qu’on en dit. Voyons le sol recevoir un grain de blé : ce grain est dur, bientôt après il se dissout et se pourrit pour produire d’autres grains bien plus beaux encore. Voyons la vigne en hiver : elle n’a ni feuilles, ni vrille, ni raisins, ce n’est que du bois tout sec, on dirait un squelette ; mais vienne le printemps, et la voilà qui reprend toute sa beauté. C’est ainsi qu’en voyant la mort et la vie se succéder dans le corps des végétaux et dans les semences, nous pourrons faire de sages méditations sur la résurrection de la chair. La fourmi nous enseignera l’amour du travail, l’abeille, l’amour du beau et les avantages de l’association, comme dit le proverbe : « Paresseux, va vers la fourmi, cherche à imiter ses voies, et deviens plus sage qu’elle. Car sans avoir de laboureur à ses côtés, sans y être obligée par personne, sans obéir à un maître, elle prépare sa nourriture pendant l’été, et durant la moisson se fait une réserve abondante. Ou bien va trouver l’abeille, et apprends d’elle ce que c’est que de travailler ; le fruit de ses travaux est recherché pour la santé et par les rois et par les simples particuliers. Son corps est faible, mais comme elle honore la sagesse, elle surpasse les autres êtres. » (Prov. 6,6-8)
3. Et l’abeille même s’entretiendra avec vous, elle vous dira de ne pas admirer à première vue la beauté du corps, quand la vertu ne s’y joint pas, et de ne point mépriser la laideur, quand l’âme est belle. C’est aussi la même recommandation que nous fait l’auteur des Proverbes, lorsqu’il dit : « L’abeille est petite entre tout ce qui vole, et son fruit l’emporte sur les fruits les plus doux. » (Sir. 2,3) Observez les oiseaux, et ce spectacle vous offrira aussi d’utiles enseignements. Ce qui, faisait dire au Christ : « Considérez les oiseaux du ciel. Ils ne sèment point, ils ne moissonnent point, et votre Père céleste les nourrit. » (Mt. 6,26) Si des êtres privés de raison ne s’inquiètent pas de leur nature, quelle excuse aurez-vous à présenter, vous qui ne montrez pas, pour les choses de ce monde, autant de dédain que les oiseaux ? Si vous voulez vous habituer à mépriser la parure, les fleurs des champs vous enseigneront le goût de la simplicité. C’est ce que le Christ nous montre par ces paroles : « Considérez les lis des champs ; ils ne travaillent point, ils ne filent point ; et cependant je vous le dis en vérité, Salomon même dans toute sa gloire n’a jamais été vêtu comme l’un d’eux. » (Mt. 6,28, 29) Lors donc