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non seulement dans le cours de sa prospérité, mais encore au milieu du terrible orage qui fondit sur toute sa maison, et sur la nature même de son corps. C’est là le principal témoignage de reconnaissance que de remercier Dieu avec effusion au milieu de ses afflictions et de ses adversités, et de persister quand mémo à lui rendre grâces : pensée qui est aussi celle du Prophète, et qu’il nous fait entendre par ce qui suit. Comme beaucoup parmi les hommes rendent grâces au Seigneur quand ils sont dans la prospérité, pour s’irriter contre lui quand leur fortune, change, et que quelques-uns vont jusqu’à critiquer ses actes, le Prophète, pour nous montrer que cette conduite n’est pas une suite naturelle des événements, mais bien le fait d’une âme pervertie, ajoute ces paroles : « Dans le conseil des « justes et dans leur assemblée les œuvres de Dieu sont grandes (2). » Il parle ainsi pour nous faire comprendre que pour un juge intègre, pour un tribunal incorruptible, il est évident que les œuvres de Dieu sont grandes et pleines de merveilles. Elles sont grandes par elles-mêmes, mais elles ne peuvent paraître telles qu’à celui dont le jugement est sain. Ainsi, le soleil est brillant et lumineux par lui-même, et il éclaire de ses rayons la terre tout entière, et cependant pour ceux dont les yeux sont malades, le soleil n’a rien de tout cet éclat. Est-ce la faute du soleil, ou n’est-ce pas plutôt celle de la maladie qui a affaibli leurs organes ? Lors donc que vous verrez un homme blâmer les œuvres de Dieu, que la perversité, de cet homme ne vous induise pas à les calomnier vous aussi, mais représentez-vous la grandeur et la providence de Dieu, et alors vous ne verrez dans les paroles de cet homme qu’un exemple remarquable d’inintelligence. Celui qui reproche au soleil d’être ténébreux, ne fait pas le procès à cet astre, mais bien à sa propre infirmité dont il donne une preuve évidente : celui qui se plaint de l’amertume du miel ne peut nous faire douter que le miel ne soit doux, mais en parlant ainsi il fait le procès à la maladie qui a dépravé chez lui le sens du goût : il en est de même de celui qui critique les œuvres de Dieu. De même que les paroles de cet homme-là n’ont de prise ni sur les œuvres de Dieu, ni sur l’idée qu’on s’en fait, et qu’elles ne servent qu’à faire ressortir son inintelligence, de même ceux qui ne jugent pas sainement des œuvres de Dieu, ne reconnaissent même pas les merveilles qui s’offrent à leurs regards, tandis qu’une âme droite et non pervertie sera étonnée devant les prodiges que recèlent même les choses qui nous paraissent le plus pénible. Et en effet, dans tout ce que fait Dieu, qu’y a-t-il qui ne soit merveilleux ? Si vous le voulez, laissons de côté tout le reste pour ne nous occuper que de ce qui paraît aux hommes pénible et fâcheux, de la mort, de la maladie, de la pauvreté et des autres choses de ce genre. Eh bien ! pour un cœur droit, il n’y a là rien qu’il ne doive approuver, admirer. Si la mort est le fruit du péché originel, cependant la puissance de Dieu, – sa bonté, sa providence sont telles qu’il a su la tourner à l’avantage du genre humain. Qu’a la mort de si pénible, dites-moi ? Ne nous délivre-t-elle pas de nos peines ? ne nous débarrasse-t-elle pas de nos soucis ! ne savez-vous pas que Job en fait l’éloge et qu’il dit : « La mort est le moment du repos pour l’homme, et ses voies lui sont cachées (Job. 3,23) ? » N’est-ce pas l’écueil du vice ? En effet, si un homme est pervers, les œuvres de sa perversité sont interrompues par sa mort : « Car celui qui est mort, est délivré du péché (Rom. 6,7) », c’est-à-dire il ne commet plus de péchés. Si c’est un homme de bien qui quitte cette vie, les œuvres de sa vertu seront pour toujours en sûreté et conservées dans un asile inviolable. La mort, dites-moi, ne rend-elle pas les vivants plus sages et plus humains ? N’avez-vous pas souvent observé ces riches si fiers dont le sourcil est relevé, quand ils rencontrent un convoi funèbre, et qu’ils voient étendu ce corps muet et immobile, qu’ils voient les enfants orphelins, la femme dans le veuvage, les amis dans le chagrin, les esclaves en vêtements noirs, et tout ce sombre attirail d’une maison en deuil ? comme ils rentrent en eux-mêmes ! comme ils s’humilient ! comme ils sont contrits l Eux qui ont entendu tant de fois prêcher la sainte parole sans en tirer aucun profit, les voilà devenus sages tout d’un coup à la vue de ce spectacle : ils comprennent combien est peu de chose et combien est peu durable cette nature humaine, combien est vermoulue et peu stable cette puissance dont ils sont fiers, et dans les malheurs qui frappent les autres, ils voient les changements qui les attendent eux-mêmes.
2. La mort est là, et cependant que de rapines, quelle cupidité. ne dirait-on pas que