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entretienne partout une foule de personnes chargées de subvenir à ses besoins, des marins, des pilotes, des artisans, des serviteurs, des tisseurs et des brodeurs, des bouviers et des bergers, des écuyers et des palefreniers, qu’il ait en un mot pour accomplir tous ses ordres un nombreux personnel : supposons en regard un autre homme qui ne jouisse d’aucun de ces avantages, qui se contente de pain et d’eau, qui ne porte qu’un vêtement très-simple. Quel est celui qui est au-dessus de l’autre, quel est celui qui est au-dessous ? N’est-il pas évident que le plus grand est celui qui n’a qu’un seul vêtement. Lui, pourra mépriser même le roi sur son trône, tandis que l’autre est l’esclave de ceux qui lui procurent tous ces biens, il s’incline devant eux, il leur adresse des paroles flatteuses, car il craint, en perdant leurs bons offices, d’éprouver un dommage considérable. Rien ne nous rend esclaves comme d’avoir beaucoup de besoins ; de même aussi rien ne nous rend libres comme de n’avoir besoin que d’une seule chose. C’est ce qu’on peut voir même chez les animaux. Que gagne un âne à porter des fardeaux considérables, dût-il en jouir mille et mille fois ? Où est le dommage pour celui qui est débarrassé de tous ces fardeaux, s’il peut compter sur la nourriture nécessaire ? C’est pourquoi le Christ voulant faire de ses disciples des hommes supérieurs aux autres, car ils allaient parler devant la terre entière, les débarrassa de toutes ces préoccupations, leur donna des ailes, leur donna des mœurs plus rigides que l’acier. Rien ne fortifie l’âme, comme de la dégager de ces entraves, et rien ne l’affaiblit, comme de ne pas l’en dégager. Dans le premier cas nous ne sommes pas plus exposés à rencontrer la douleur, que nous ne le sommes, dans le second, à rencontrer le plaisir. De ces deux hommes, en effet, l’un a des maîtres et des maîtresses nombreux, difficiles et cruels, l’autre n’est l’esclave de personne et est le maître de tous, et cela en toute sécurité il jouit de la lumière du soleil, est insensible aux intempéries de l’air, et ne connaît nulle contrariété. La colère ne le surexcite pas, la haine, la jalousie, les soucis ne rident pas son front, ni ces passions, ni aucune autre de ce genre. Son âme est aussi calme qu’une rade aux eaux paisibles où ne pénètre pas la tempête, et il suit d’un pas tranquille le chemin qui le conduit vers le ciel, sans se laisser détourner par les biens d’ici-bas. Afin donc que nous aussi nous jouissions de cette sécurité, et de ce calme inaltérable pendant la vie présente, et que nous franchissions le grand passage avec autant de sérénité, efforçons-nous de nous conformer à ce genre de vie, c’est ainsi que nous jouirons des biens éternels, de ces biens qui défient toute description, qui surpassent notre imagination et notre intelligence, en Jésus-Christ Notre-Seigneur, auquel appartiennent la gloire et la puissance, dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.