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fait était un perfectionnement qui anéantissait le premier, puisqu’il lui succédait. Mais si Jésus
Christ, au contraire, est postérieur à la loi, s’il a adopté un autre type sacerdotal, il est évident que tout le lévitisme est imparfait ; car supposons un instant, dit l’apôtre, que le sacerdoce antérieur à Jésus-Christ, celui d’Aaron, était parfait et ne laissait rien à désirer ; pourquoi donc dès lors l’Écriture nous parle-t-elle d’un prêtre selon l’ordre de Melchisédech et non selon l’ordre d’Aaron ? Pourquoi laisser Aaron et introduire un autre sacerdoce, à savoir, celui de Melchisédech, si la perfection se trouvait dans le sacerdoce lévitique, c’est-à-dire, si ce sacerdoce lévitique avait, au complet, toute la doctrine et de la foi et des mœurs ? Et remarquez, comme sans dévier d’un pas, l’apôtre avance
Il avait dit « selon l’ordre de Melchisédech » et avait montré que ce sacerdoce était le plus grand, parce que Melchisédech était plus grand qu’Abraham. Puis, il prouve encore la même chose par la considération du temps, en disant que, puisque le sacerdoce selon l’ordre de Melchisédech a paru après celui d’Aaron, c’est qu’il est plus grand.
Mais que signifient ces paroles qui suivent immédiatement : « Sous lequel [sacerdoce] le peuple a reçu la loi ? » Que veut dire « sous lui ? » C’est que par lui le peuple marche, le peuple fait tout par lui : on ne peut dire qu’il ait été donné à d’autres qu’à lui. C’est sous lui que le peuple a reçu la loi, c’est-à-dire, grâce à son ministère. Et l’on ne peut dire que la loi était parfaite, mais non imposée au peuple. Le peuple, dit l’apôtre, a reçu la loi sous lui, c’est-à-dire par son organe et intermédiaire. Qu’était-il donc besoin d’un autre sacerdoce, si celui-là était parfait ? « Car le sacerdoce étant transféré, il faut aussi que la loi le soit ». Si donc un autre prêtre, ou plutôt un autre sacerdoce est devenu nécessaire, il faut aussi nécessairement une autre loi. Ceci est à l’adresse de ceux qui disent : Qu’était-il besoin d’un Nouveau Testament ? Il aurait pu prouver ce besoin par les prophètes eux-mêmes : « Voici », disent-ils, « le testament, l’alliance que j’ai faite avec vos « pères ». Pour le moment, il n’argue que d’après le sacerdoce. Et voyez comme il brillait d’arriver à cette conclusion. Il a dit : Selon l’ordre de Melchisédech : c’était rejeter déjà le sacerdoce d’Aaron. Car si un autre sacerdoce a été introduit depuis lors, il a bien fallu aussi qu’il vint un autre testament. Car il est impossible qu’un prêtre soit sans testament, ni lois, ni préceptes ; ou qu’en recevant son sacerdoce, il se serve de l’antique alliance.
On pourrait lui objecter : Comment fut donc prêtre celui qui n’était pas lévite ? Mais comme il a établi plus haut comme vérité fondamentale la maxime contraire, il ne veut pas même résoudre une telle objection, et ne lui jette qu’en passant cette réponse : Je vous ai dit que le sacerdoce a été transféré ; donc aussi le testament ; et Dieu ne l’a pas seulement changé dans son mode et dans ses règles, mais même dans la tribu. Comment ? C’est que le sacerdoce est transféré d’une tribu à me autre, de la tribu sacerdotale à la tribu royale, de sorte qu’à l’avenir elle réunit sacerdoce et royauté. Or, voyez le mystère. De royale qu’elle était d’abord, elle est maintenant devenue sacerdotale. Ainsi s’est-il fait en Jésus-Christ. Lui qui fut toujours roi, a été fait prêtre quand il prit notre chair, quand il offrit le sacrifice. Voyez-vous le changement ? Ce qu’on lui présentait comme une objection, l’apôtre l’établit précisément et par la seule logique des faits. « En effet, celui dont ces choses ont été prédites », nous dit-il, « est d’une autre tribu dont personne n’a jamais servi à l’autel ; puisqu’il est manifeste que Notre-Seigneur est sorti de Juda, tribu à laquelle Moïse n’a jamais attribué le sacerdoce (13, 14) ». L’apôtre dit donc équivalemment : Et moi aussi je sais qu’il n’a eu aucune part à votre sacerdoce ; que nul de cette tribu ne l’a exercé, comme le montre évidemment cette affirmation : « Nul n’a jamais servi à l’autel ». Tout est donc transféré. Ainsi était-il nécessaire que la loi ancienne et l’Ancien Testament fussent transférés, puisque la tribu [sacerdotale] elle-même a été changée.
2. Or, voyez comme il va dévoiler une autre différence que celle que lui fournit déjà ce changement de tribu. Il ne lui suffit pas de montrer la différence immense qui résulte de la tribu, de la personne, de la manière, du testament, mais il va la prouver par le personnage figuratif. « Lequel [Melchisédech] n’est point établi selon la disposition d’une loi charnelle, mais par la puissance de sa vie immortelle (16) ». – Il a été fait prêtre, dit-il, non pas selon la disposition d’une loi charnelle ; car cette loi, dans sa plus grande partie, n’était point légitime ; et l’apôtre a raison de l’appeler une loi charnelle ; car tous ses règlements étaient charnels. Car voici ce qu’elle commandait : Coupez votre chair, oignez votre chair, lavez votre chair, purifiez votre chair, tondez votre chair, liez votre chair, nourrissez votre chair, donnez le repos à votre chair ; ne sont-ce pas, je vous prie, autant de lois charnelles ? Que si vous voulez savoir quels biens elle promettait, écoutez : Longue vie à votre chair, était-il dit, à votre chair lait et miel, paix à votre chair, plaisir à votre chair. C’est d’une telle loi qu’Aaron reçut le sacerdoce, mais non pas certes Melchisédech.
« Et ceci parait encore plus clairement, en ce qu’il se lève un autre prêtre selon l’ordre de Melchisédech (15) ». Qu’est-ce qui parait clairement ? La différence qui est très-grande entre les deux sacerdoces, et l’incontestable prééminence du personnage qui n’a pas été fait prêtre par la disposition d’une loi charnelle. Et qui est celui-ci ? Est-ce Melchisédech ? Non, mais Jésus-Christ, qui l’est par la vertu de sa vie immortelle ; ainsi que l’Écriture le déclare par ces mots : « Vous êtes le Prêtre éternel selon l’ordre de Melchisédech (17) », c’est-à-dire, non pour un temps, non pour finir, mais selon la vertu d’une vie immortelle. Par ces paroles, il nous montre que Jésus a été fait prêtre par sa vertu et par celle de son Père, par sa vie qui n’a point de fin. Toutefois, ceci ne s’ensuit pas logiquement de ce qui a été dit plus haut : « il n’a pas été fait prêtre par la disposition d’une loi charnelle » ; le raisonnement exigeait : Il l’a été par une loi spirituelle. Mais, par « charnel » l’apôtre entend plutôt temporel, comme quand il dit