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moyen à prêter toute son attention à la demande qui lui est faite. « La grâce de Notre-Seigneur Jésus-Christ soit avec ton esprit. Ainsi soit-il ».
2. C’est une prière qui termine cette lettre ; or la prière est un grand bien, un bien salutaire, un bien qui garde nos âmes. C’est un grand bien, mais lorsque nos actions sont dignes de la prière, lorsque nous ne nous rendons pas nous-mêmes indignes d’elle. Lors donc que tu auras été trouver un prêtre et qu’il t’aura dit : Mon fils, Dieu aura pitié de toi, ne mets pas ta confiance dans cette parole seulement, mais applique-toi aux œuvres, rends-toi digne de la miséricorde de Dieu. Dieu te bénira, mon fils, si par tes actions tu mérites d’être béni ; il te bénira, si tu as de la compassion pour ton prochain, car ce que nous voulons obtenir de Dieu, nous devons d’abord l’accorder à autrui, mais si nous en privons les autres, comment voulons-nous l’obtenir ? « Bienheureux les miséricordieux, parce qu’ils trouveront miséricorde ». (Mt. 5,7) Si en effet il y a des hommes qui ont pitié des infortunés, Dieu aura plus de miséricorde encore pour eux-mêmes ; mais il n’en sera pas ainsi pour ceux qui n’auront pas eu pitié. « Car le jugement sera sans miséricorde pour « ceux qui n’auront pas été miséricordieux ». (Jac. 2,13) C’est une bonne chose que la miséricorde : pourquoi donc ne l’accordes-tu pas aux autres ? Veux-tu qu’on te pardonne lorsque tu as fait une faute ? Pourquoi donc ne pardonnes-tu pas à celui qui a péché ? Quoi ! tu t’approches de Dieu pour lui demander le royaume des cieux, et toi, lorsqu’on te demande de l’argent, tu n’en donnes pas ! Si donc nous n’obtenons pas miséricorde, c’est parce que nous ne sommes pas miséricordieux.
Pourquoi ? diras-tu : car ce serait un effet de la miséricorde de Dieu que d’avoir pitié de ceux mêmes qui sont sans pitié. Ainsi celui qui montre de la bienveillance à un homme cruel, farouche, qui a causé mille maux au prochain, celui-là pourrait être appelé miséricordieux ? – Pourquoi non, dis-tu ? est-ce que le baptême ne nous sauve pas malgré les mille fautes que nous avons commises ? – Nous en avons été délivrés, oui, mais ce n’est pas pour que nous recommencions à pécher, c’est pour que nous ne péchions plus : « Si nous sommes morts au péché, comment y a vivrons-nous encore ? Quoi donc ! pécherons-nous parce que nous ne sommes point sous la loi, mais sous la grâce ? A Dieu ne plaise ! » (Rom. 6,2, 15) Le baptême t’a délivré de tes fautes, mais c’est pour que tu ne retombes plus dans le même péché. Ainsi les médecins qui soignent la fièvre, nous délivrent de son ardeur brûlante, non pas afin que nous abusions de nos forces pour retomber dans le mal et le désordre (car il vaudrait mieux rester malade que de ne sortir de maladie que pour y retomber d’une manière plus fâcheuse), mais afin que, connaissant par expérience notre faiblesse, nous prenions plus de soin de notre santé, et que nous fassions tout ce qui peut lui être utile.
Où est donc, diras-tu, la bonté de Dieu, s’il ne veut pas sauver les méchants ? – Ce que j’ai entendu souvent dire par bien des bouches, c’est que Dieu est bon, et il nous sauvera tous sans exception. Mais pour que nous ne nous trompions pas nous-mêmes inconsidérément, je vais tenir une promesse que je me rappelle vous avoir faite à ce propos, et débattre aujourd’hui même cette question devant vous. Il n’y a pas longtemps je vous ai parlé de l’enfer, et je me suis réservé de vous parler une autrefois de la clémence de Dieu : voici le moment opportun pour tenir une promesse.
Que l’enfer soit éternel, c’est, je crois, ce que nous avons sans doute suffisamment démontré par l’exemple du déluge et des maux qui ont frappé les premiers hommes : nous disions qu’il n’était pas possible que le Dieu qui a montré alors cette rigueur, laissât impunis les coupables qui vivent en ce moment. Car s’il a infligé ces châtiments à ceux qui ont péché sous la loi, il ne laissera pas sans punition ceux qui, sous le règne de la grâce, ont commis des fautes bien plus grandes encore. Nous nous demandions donc comment sa bonté, comment sa clémence s’accorde avec les châtiments qu’il inflige ; et nous avons remis ce point à un autre jour, pour ne pas fatiguer vos oreilles par la longueur de notre discours. Payons aujourd’hui notre dette et montrons comment Dieu est bon lors même qu’il punit. Ce discours pourrait encore nous être utile pour réfuter lés hérétiques : prêtons-y donc toute notre attention.
Dieu nous a créés sans avoir aucunement besoin de nos services qu’il n’en ait nul besoin, c’est ce qu’il a montré en nous créant si tard ; car s’il eût eu besoin de nous, il nous