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Pierre le second évêque de l’Église romaine. – « Lin et Claudie », dit-il. Les femmes alors étaient pieuses et ferventes, comme Priscille et Claudie dont on parle ici. Elles étaient déjà crucifiées au monde et prêtes à tout souffrir. Mais pour quelle raison, lorsqu’il y avait tant de disciples, saint Paul nomme-t-il ces femmes ? C’est sans aucun doute parce qu’elles étaient élevées par leurs sentiments au-dessus des choses de ce monde, parce qu’elles brillaient par leur vertu entre tous les disciples. Son sexe n’est pas pour la femme un obstacle à la vertu. C’est un grand don de Dieu qu’il n’y ait que les choses de ce monde où le sexe de la femme soit pour elle un désavantage ; ou, pour dire la vérité, son sexe n’est point un désavantage pour elle-même dans les choses de ce monde. Car la femme n’a pas une petite part dan s l’administration, puisqu’elle a pour sa part les affaires domestiques. Sans elle, on peut dire que les affaires publiques mêmes seraient bientôt ruinées. Si elle n’était là pour empêcher le trouble et le désordre de se mettre dans l’intérieur des maisons, les citoyens seraient obligés de rester chez eux et les affaires publiques en souffriraient. Elle n’a donc pas un rôle moins important que l’homme tant dans les affaires du monde que dans les choses spirituelles. Dieu ne lui a pas même ôté la gloire du martyre, et il y en a eu un très-grand nombre qui ont été glorieusement couronnées pour la foi. Elles peuvent même mieux garder la chasteté que les hommes, n’étant pas emportées par des ardeurs aussi violentes. Elles peuvent aussi mieux pratiquer l’humilité, la modestie, et parvenir à cette sainteté « sans laquelle nul ne verra jamais Dieu ». (Heb. 12,14) On en pourrait dire autant du mépris des richesses et de toutes les autres vertus. – « Tâchez de venir avant l’hiver ». Comme il le presse ! Cependant il ne dit rien pour l’affliger. Il ne dit pas : Avant que je meure, pour ne pas l’attrister, mais « avant l’hiver », de peur que le mauvais temps ne vous retienne. – « Eubule vous salue, ainsi que Pudens, Lin et Claudie et tous les autres frères ». Il ne nomme pas les autres, il accorde cet honneur à ceux-ci en considération de leur vertu.

« Que le Seigneur. Jésus-Christ soit avec votre esprit ». Il ne pouvait faire un meilleur souhait que celui-là. Ne vous affligez pas, dit-il, de ce que je vais bientôt mourir. Le Seigneur est avec vous, et non simplement avec vous, mais avec votre esprit : double secours ; la grâce de l’Esprit et l’aide de Dieu. Et Dieu ne peut être avec nous sans que la grâce de son Esprit y soit aussi. Si elle nous quittait, comment serait-il avec nous ? – « Que la grâce soit avec nous. Ainsi sait-il ». Saint Paul fait aussi enfin une prière pour lui-même. Il veut dire : Que nous soyons toujours agréables à Dieu, que nous ayons sa faveur et ses dons : avec cela, il n’y aura plus rien de pénible. Celui qui jouit de la vue du prince et qui possède sa faveur, n’a rien à redouter ni à souffrir ; de même fussions-nous abandonnés de nos amis, ou tombés dans quelque danger, nous serons insensibles à tout, si cette grâce est avec nous et nous entoure de sa protection.

4. Par quel moyen nous concilier cette grâce ? En faisant ce qui plaît à Dieu, et en lui obéissant en tout. Dans les grandes maisons, les serviteurs qui ont le plus de part aux bonnes grâces de leur maître, sont toujours ceux qui, s’oubliant eux-mêmes, ne s’occupent que des affaires de leur maître, mais de toute leur âme et avec ardeur, qui mettent tout en bon ordre non par force et parce qu’on le leur commande, mais par bonne volonté et par affection ; qui ont toujours les yeux attachés sur ceux de leur maître ; qui courent, qui volent au moindre signe, qui n’ont pas d’affaires ni d’intérêts propres, excepté ceux de leur maître. Le serviteur qui fait de tout ce qu’il a, la propriété de son maître fait de tout ce qu’a son maître sa propriété particulière. Il commande comme lui dans ses domaines, il est maître comme lui. Les autres serviteurs le respectent ; ce qu’il dit, son maître le confirme. Quant aux ennemis, ils le redoutent. Si dans les choses de ce monde, celui qui néglige, ses propres intérêts pour prendre ceux de son maître, ne néglige en réalité point ses affaires, mais les avance considérablement, combien cela est-il plus vrai dans les choses spirituelles ! Méprisez donc ce qui est à vous, et vous acquerrez ce qui est de Dieu. C’est lui qui vous le commande. Méprisez la terre pour conquérir le ciel. Soyez-y d’esprit et de cœur, et non sur la terre. Faites-vous craindre du côté de l’esprit, non du côté matériel. Si vous vous rendez redoutable du côté du ciel, vous ne le serez pas seulement aux hommes, mais encore aux démons, et