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toute occasion de soupçon et ne donnant pas l’ombre d’un prétexte à ceux qui veulent nous calomnier.
« Honorez les veuves qui sont véritablement veuves (3) ». Pourquoi ne parle-t-il pas ici de la virginité, pas même pour dire : Honorez les vierges ? Apparemment parce qu’il ne s’en trouvait point alors, ou qu’elles avaient succombé. Car, dit-il, Satan en a entraîné plusieurs à sa suite. « Honorez les veuves qui sont véritablement veuves ». L’on peut donc n’avoir plus de mari et n’être pas veuve. De même que l’on n’est pas vierge, pour vivre en dehors du mariage, mais qu’il faut être irréprochable et toujours appliquée à ses devoirs, de même en est-il de la viduité : ce qui fait la veuve, ce n’est pas la perte d’un époux, mais la vie passée dans la continence, la patience et la solitude. Voilà les veuves que l’apôtre recommande d’honorer avec raison : On doit en effet un grand respect à ces femmes, puisqu’elles sont seules, puisqu’elles n’ont plus un homme pour les protéger ; mais, auprès de la foule, leur état est exposé au blâme et paraît de mauvais augure. Aussi l’apôtre veut-il qu’elles soient grandement honorées par le prêtre ; et ce n’est pas seulement pour cela, mais parce que leur état en est digne.
« Si une veuve a des enfants ou des, petits-enfants, qu’elle apprenne d’abord à faire régner la piété dans sa maison et à rendre ce qu’elle doit à ses parents (4) ». Voyez la prudence de Paul et comment, dans ses avis, il fait souvent appel à des raisonnements humains. Il n’a point apporté ici une idée grande et sublime, mais quelque chose qui fût accessible à tous : rendre ce qu’elle doit à ses parents. Comment cela ? Vous avez été nourrie, vous avez grandi, vous avez joui de l’honneur qu’ils vous transmettaient. Ils ont quitté ce monde, et vous n’avez pu les payer de retour, car vous ne leur avez donné ni la vie ni la nourriture ; rendez-leur ce bienfait dans leurs descendants, acquittez dans vos enfants votre dette envers eux : « Que ces veuves apprennent d’abord à faire régner la piété dans leurs maisons ». L’apôtre exprime ainsi par un mot l’accomplissement de tous les devoirs. « Car », dit-il, « cela est favorablement accueilli de Dieu (4) ». Et comme il a dit : « Qui sont véritablement veuves », il exprime ce qu’est une véritable veuve. « Celle-là est véritablement veuve qui vit dans la solitude, espérant en Dieu et persévérant nuit et jour dans la n prière et l’oraison ; mais celle qui est dans les délices est morte toute vivante (5, 6) ». Ainsi l’apôtre nous dit. Celle qui n’a pas choisi une vie mondaine, et qui vit dans la viduité, celle-là est véritablement veuve ; celle qui espère en Dieu comme on le doit faire, qui s’adonne à l’oraison et y persévère nuit et jour, celle-là est veuve ; ce qui ne veut pas dire que la veuve qui a des enfants ne le, soit pas véritablement, car l’apôtre admire aussi celle qui donne à ses enfants l’éducation qu’elle leur doit, mais il parle ici de celle qui n’a pas d’enfants, qui est seule. Il la console ensuite de ne point avoir d’enfants, en lui disant que c’est ainsi qu’elle est parfaitement veuve, parce qu’elle se trouve privée non seulement de la consolation que lui eût donnée son mari, mais de celle qu’elle eût reçue de ses enfants ; elle a Dieu pour les remplacer tous. Car celle qui est privée d’enfants n’est pas au-dessous de l’autre ; mais l’apôtre remplit par ses consolations le vide que cette privation lui fait éprouver. Ne vous affligez pas, lui dit l’apôtre, si vous entendez cette parole qu’il faut élever des enfants (4), vous qui n’en avez pas, comme si votre dignité en était amoindrie, car vous êtes véritablement veuve. « Celle qui vit dans les délices est morte toute vivante ».
3. Plusieurs en effet, ayant des enfants, conservent la viduité, non pour s’interdire les jouissances de la vie, mais plutôt pour en nourrir le goût chez elles, pour vivre avec plus d’indépendance et se donner davantage aux passions du monde ; que leur dit-il ? « Celle qui vit dans les délices est morte toute vivante ». Quoi ! une veuve ne doit pas vivre dans les délices ? Non, vous dit l’apôtre. Si donc la faiblesse de l’âge et de la nature ne rend point nécessaire une pareille vie, mais si cette manière d’agir procure la mort et la mort éternelle, que pourraient alléguer des hommes qui vivent ainsi ? C’est avec justice qu’il a dit « Celle qui vit dans les délices est morte toute vivante ». Voyons ce que font les vivants, quelle est la condition des morts et dans quels rangs nous devons la placer. Les vivants sont ceux qui font les œuvres de la vie à venir, de la véritable vie. Or, quelles sont les couvres de la vie à venir, dont nous devons nous occuper sans cesse ? Écoutez la parole du Christ. « Venez hériter du royaume qui vous a été préparé