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deux choses : il montre que la charité est tellement nécessaire, qu’elle n’a pas même besoin d’être enseignée, car les vérités d’une grande importance éclatent aux yeux de tous ; ensuite il les touche plus vivement en leur parlant ainsi, que s’il leur adressait une exhortation. Celui qui, par la considération que vous avez fait votre devoir, se dispense de vous exhorter, supposé que vous ne l’ayez pas rempli, vous excite plus fortement à l’accomplir. Et maintenant, voyez, il ne parle pas de la charité envers tous, mais de la charité envers ses frères. « Nous n’avons pas besoin de vous écrire ». Il fallait donc se taire, ne rien dire, puisqu’il n’en était pas besoin. Mais, en disant : Il n’est pas besoin, il dit plus que s’il faisait un discours en règle : « Puisque Dieu vous a appris lui-même ». Voyez quel honneur il leur fait : il leur donne Dieu lui-même pour maître. Il n’est pas nécessaire, dit-il, qu’un homme vous instruise. C’est ce que dit encore le Prophète : « Dieu leur apprendra à tous ». – « Puisque Dieu vous a appris lui-même », dit-il, « à vous aimer les uns les autres, et, vraiment, c’est ce que vous pratiquez à l’égard de tous nos frères, qui sont dans toute là Macédoine », et à l’égard de tous les autres, dit-il. Ce sont là des paroles tout à fait pressantes, pour les porter à cette conduite. Ce n’est pas sans y penser que je vous dis que Dieu vous a instruits lui-même ; je le vois bien, aux œuvres que vous faites ; et, à l’appui de ces paroles, il cite un grand nombre de témoignages.

« Nous vous exhortons, mes frères, à vous avancer de plus en plus dans cet amour, à vous étudier, à vivre en repos, à vous appliquer chacun à ce que vous avez à faire, à travailler de vos propres mains, ainsi que nous vous l’avons ordonné, afin que vous vous conduisiez honnêtement envers ceux qui sont hors de l’Église, et que vous vous mettiez en état de n’avoir besoin de personne ». Il leur montre ici combien de maux résultent de l’oisiveté ; de combien de vertus le travail est la source. Vérité qu’il met hors de contestation, par des exemples pris des choses qui nous entourent, comme il le fait dans un grand nombre de passages ; l’apôtre a grande raison de procéder ainsi : car, pour le commun des hommes, les choses sensibles sont plus éloquentes que les choses spirituelles. Le propre de la charité envers le prochain, ce n’est pas de recevoir, mais de donner. Et maintenant, voyez la sagesse de l’apôtre ; au moment d’adresser aux fidèles une prière, des avertissements, il s’arrête, il établit simplement la règle de la vertu parfaite ; il veut laisser aux fidèles un moment pour respirer, après ses premiers avertissements ; il veut qu’ils puissent se remettre de ses menaces. On l’a entendu dire : « Donc l’outrage n’est pas un outrage à un homme, mais à Dieu ». Une raison si forte ne souffre pas qu’on regimbe contre le précepte. Or, maintenant, l’effet du travail c’est que l’homme actif ni ne reçoit rien des autres, ni ne languit dans l’oisiveté. Celui qui travaille, donne aux autres : « C’est un plus grand bonheur », est-il dit, « de donner que de recevoir ». (Act. 20,35)

« À travailler », dit-il, « de vos propres « mains » ; où sont ceux qui veulent voir ici une œuvre spirituelle ? Comprenez-vous comment le texte enlève à cette explication toute vraisemblance, par ces mots : « De vos propres mains ? » Est-ce qu’on jeûne avec les mains ? Est-ce qu’elles servent à veiller, à coucher sur la dure ? Nul ne peut le soutenir. Mais il parle d’un travail spirituel ; c’est en effet une œuvre spirituelle que de travailler pour fournir aux besoins des autres, et rien ne vaut ce travail. « Afin que vous vous conduisiez honnêtement ». Voyez sa manière de les toucher : il ne dit pas : De peur que vous ne vous déshonoriez en mendiant, mais il exprime implicitement cette pensée, d’une manière douce, de manière à piquer sans être blessant. Car, si les fidèles qui sont avec nous, se scandalisent de cette mendicité, à plus forte raison les étrangers trouvent-ils mille sujets d’accusations et de reproches, à la vue d’un homme sain de corps, pouvant se suffire à lui-même, et qui mendie, et qui a besoin des autres. Aussi nous appellent-ils d’un nom qui signifie « marchands du Christ. Voilà comment », dit-il ailleurs, « le nom de Dieu est blasphémé ». (Rom. 2,24) Mais ici, rien de pareil. Il leur parle de ce qui pouvait le plus les toucher de la honte d’une pareille conduite. « Or, nous ne voulons pas, mes frères, que vous ignoriez ce que vous devez savoir, touchant ceux qui dorment du sommeil de la mort, afin que vous ne vous attristiez pas, comme font les autres hommes qui n’ont point d’espérance (12) ».

2. Les deux plus grandes causes des troubles de leurs pensées, c’étaient la pauvreté, et un chagrin porté au découragement, raisons