Page:Chronique de Guillaume de Nangis.djvu/87

Cette page n’a pas encore été corrigée
72
CHRONIQUE
[1190]

Philippe, roi de France ; Richard, roi d’Angleterre Eudes, duc de Bourgogne ; Philippe, comte de Flandre ; Henri, comte de Champagne ; Thibaut comte de Blois ; Etienne, comte de Sancerre ; un grand nombre d’évêques, et presque tous les barons et chevaliers du royaume de France, ayant pris la croix du Seigneur, se mirent en route, avec une innombrable armée et un incroyable appareil, pour le pays d’outre-mer. Dès qu’ils se furent embarqués, repoussés dans différens ports par une tempête, ils abordèrent à différens rivages. Le roi Philippe et le roi Richard abordèrent avec peine à Messine, ville de Sicile, et ne pouvant avancer au-delà, ils y passèrent l’hiver ensemble. Alors vint vers eux l’abbé Joachim, appelé de son monastère, situé en Calabre. Interrogé par eux sur l’avenir, il répondit qu’ils traverseraient la mer, mais qu’ils ne feraient rien ou peu de chose, parce que le temps n’était pas venu où Jérusalem et le pays d’outre-mer devaient être délivrés.

Frédéric, empereur des Romains, ayant conclu la paix avec Cursat, empereur des Grecs, et passé le Bosphore, traversa l’Asie, et ses troupes éprouvèrent de grandes pertes, tant par les attaques des ennemis, que par le manque de vivres. Il craignait de faire le voyage par mer, parce que, comme il est dit dans ses histoires, appelées les Frédériques, il lui avait été prédit qu’il mourrait dans l’eau. Il pour- suivit jusqu’à Iconium le soudan de cette ville, qui empêchait d’arriver les vivres qu’il lui avait promis, et ravagea par le feu les environs d’Iconium ; ensuite étant arrivé à un certain défilé, il y trouva une multitude infinie de Turcs, et, les attaquant, les vainquit