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DE GUILLAUME DE NANGIS

avec ses Turcs vers Jérusalem. Ayant mis le siège devant cette ville du côté de l’occident, il l’assaillit pendant dix jours consécutifs ; mais les citoyens lui opposèrent une courageuse résistance. Les Turcs, voyant qu’ils n’avançaient en rien de cette manière, dirigèrent leurs attaques sur la Cité sainte du côté de l’occident. Alors les habitans, considérant qu’ils ne pourraient résister aux assiégeans, prirent en commun la résolution de se rendre, vie et bagues sauves. Mais Saladin, comme ils avaient long-temps résisté à sa volonté, demanda qu’il lui fût donné pour leur rançon dix bysantins pour chacun des habitans au dessus de quinze ans, cinq pour chaque femme, et un pour chaque enfant. Dès qu’on se fut accordé de part et d’autre, le second jour d’octobre, qui était le treizième du siège, un vendredi, la sainte Cité, chose douloureuse à rapporter, fut livrée à Saladin. Il fit aussitôt briser les cloches des églises, dont les Turcs firent des étables pour leurs chevaux et leurs bêtes de somme. Les Syriens rachetèrent à prix d’or l’église du sépulcre, de peur qu’elle ne fût souillée par les ordures des Gentils. Saladin fit arroser d’eau de rose, en dedans et en dehors, avant d’y entrer, le temple du Seigneur, que les Turcs, selon leurs rites, avaient depuis long-temps en vénération. Il tint quitte de la taxe imposée beaucoup de milliers de pauvres, qui ne pouvaient la payer, et fit pendant quelque temps donner sur son propre fisc le nécessaire à des malades. La reine Sibylle, avec le patriarche Héraclius, les Templiers, les Hospitaliers et une immense troupe d’exilés, partirent pour Antioche ; d’autres naviguèrent vers Alexandrie ou vers la Sicile.