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DE GUILLAUME DE NANGIS

à l’exception des deux ladreries d’Angleterre. Par la persuasion du diable, servi par les Juifs dans cesdites assemblées des lépreux, les principaux d’entre eux dirent aux autres que, comme leur lèpre les faisait paraître aux Chrétiens vils, abjects, et ne méritant aucune considération, il leur était bien permis de faire que tous les Chrétiens mourussent ou fussent tous semblablement couverts de lèpre, en sorte que lorsqu’ils seraient tous lépreux personne ne serait méprisé. Ce funeste projet plut à tous, et chacun dans sa province l’apprit à d’autres. Ainsi, un grand nombre, séduits par de fausses promesses de royaumes, de comtés et d’autres biens temporels, s’annonçaient entre eux et espéraient fermement qu’il en serait ainsi. Cette année, vers la fête de saint Jean-Baptiste, on en brûla un dans la ville de Tours, qui se nommait l’abbé de Mont-Mayeur. Par les soins des Juifs, ces poisons mortels étaient par les lépreux répandus dans tout le royaume de France, et l’eussent été davantage, si le Seigneur n’avait si promptement révélé leur perfidie. Un édit du roi, au sujet des lépreux, déclara que les coupables seraient livrés aux flammes, et les autres renfermés perpétuellement dans les ladreries, et que si quelque lépreuse coupable était enceinte, elle serait conservée jusqu’à ce qu’elle eût accouché, et ensuite livrée aux flammes. Les Juifs furent aussi brûlés dans quelques surtout pays, en Aquitaine. Dans le bailliage de Tours, en un château du roi appelé Chinon, on creusa une fosse immense, et un grand feu y ayant été allumé, on y brûla en un seul jour cent soixante Juifs de l’un et l’autre sexe ; beaucoup d’entre eux, hommes et femmes,