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CHRONIQUE

sonnier dans une forteresse située dans l’Empire. Mais le frère Gauthier ayant été pris, malgré beaucoup de tourmens, il ne fit absolument aucun aveu, et ainsi on ne put trouver de preuve de l’accusation. Cependant pour cela on ne délivra pas encore de sa prison le comte de Nevers ; et quoique le roi eût envoyé au comte une lettre solennelle pour sa délivrance, ceux qui le retenaient ne voulurent point le laisser aller, à moins qu’il ne leur pardonnât de l’avoir emprisonné, et ne leur remît une garantie suffisante qu’à l’avenir il ne leur causerait aucun dommage, soit par lui-même soit par les mains d’aucun autre, et à cette condition que tant que son père vivrait il n’entrerait pas dans le comté de Flandre. C’étai par méchanceté qu’ils exigeaient cette condition, afin qu’à la mort de son père, Robert, autre fils du comte de Flandre, se mît en possession du comté. Quoique le comte de Nevers eût long-temps différé d’y consentir, cependant voyant qu’il n’avait d’autre moyen d’être délivré, il y consentit enfin, et sortit ainsi avec peine de sa prison.


[1321]

L’an du Seigneur 1321, le roi de France visita soigneusement le comté de Poitou, qu’il tenait de son père par droit héréditaire, et il avait résolu, dit-on, d’y demeurer long-temps, lorsque vers la fête de saint Jean-Baptiste le bruit public vint à ses oreilles que, dans toute l’Aquitaine, les sources et les puits avaient été ou seraient bientôt infectés de poison par un grand nombre de lépreux. Beaucoup de lépreux, avouant ce crime, avaient déjà été condamnés à mort et brûlés dans la haute Aquitaine. Leur dessein était, comme ils l’avouèrent au milieu des flammes, en répandant partout du poison, de faire périr tous les