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CHRONIQUE

téger et favoriser volontiers et avec bienveillance dans cette affaire. C’est pourquoi, comme si on voulait procéder contre lui par voie de modération et agir à son égard avec moins de sévérité, et pendant qu’on le disait déjà presque condamné à être relégué en exil dans l’île de Chypre jusqu’à ce que le roi le rappelât, voilà que tout-à-coup vint aux oreilles dudit Charles le bruit que Jacques dit Delor, sa femme et son serviteur, avaient, par les suggestions de la femme et de la sœur dudit Enguerrand et d’Enguerrand lui-même, fabriqué certaines images figurées, lesquelles devaient par sortilège procurer la délivrance d’Enguerrand, et jeter un maléfice tant sur le roi que sur Charles et sur d’autres personnes. Ce crime ayant été découvert, ledit Jacques, enchaîné dans un cachot, s’étrangla de désespoir et sa femme fut ensuite brûlée. La femme et les sœurs d’Enguerrand furent renfermées en prison, et enfin Enguerrand lui-même, condamné en présence des chevaliers, fut pendu à Paris sur le gibet des voleurs. Il n’avoua rien cependant quant auxdits maléfices, et dit seulement que d’autres avaient été avec lui auteurs des exactions et des altérations de monnaie, et qu’il n’avait pu faire entendre sa justification, malgré ses instantes sollicitations et la promesse qu’on lui avait donnée dans le commencement. C’est pourquoi son supplice, dont bien des gens ne connurent pas entièrement les motifs, fut un grand sujet de surprise et de stupeur.

Pierre de Latilly, évêque de Châlons, soupçonné de la mort du roi de France Philippe et de celle de son prédécesseur, fut, par l’ordre du roi, retenu en prison, au nom de l’archevêque de Rheims. Raoul de Preste,