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DE GUILLAUME DE NANGIS

din, qui tenait prisonnier saint Louis, roi de France, fut tué par les siens. Alors le saint roi ayant donné une rançon et rendu Damiette aux Sarrasins, fut délivré ! avec ses frères et les autres prisonniers chrétiens. Après sa délivrance, il envoya en France ses deux frères, Charles et Alphonse, pour consoler leur mère. Lui même, passant à Acre, fit munir cette ville de remparts et de tours, et fit aussi fortifier Jaffa et Sidon, et quelques autres châteaux, de manière qu’ils pussent résister aux ennemis. Étant resté dans la Terre-Sainte pendant l’espace d’environ cinq ans, il racheta beaucoup de prisonniers chrétiens, et fit en outre beaucoup de bien.


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Il arriva dans le royaume de France un événement surprenant, une chose nouvelle et inouie. Quelques chefs de brigands, pour séduire les gens simples et répandre la croisade parmi le peuple, annoncèrent, par des inventions pleines de fausseté, qu’ils avaient eu une vision d’anges, et que la sainte Vierge Marie leur était apparue et leur avait ordonné de prendre la croix, de rassembler une armée de pâtres et des hommes les plus vulgaires du peuple, que le Seigneur avait choisis pour marcher au secours de la Terre-Sainte et du roi de France, captif en ce pays. Ils représentaient, avec des images dessinées sur les bannières qu’ils faisaient porter devant eux, la teneur de cette vision. Passant d’abord par la Flandre et la Picardie, ils attiraient à eux, par leurs exhortations, les pâtres et le bas peuple des villages et des campagnes, de même que l’aimant attire le fer. Lorsqu’ils parvinrent en France, leur nombre s’était déjà tellement accru que, rangés par milliers et par