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CHAPITRE VII.

loir, à Mathurin Salligot et Achille Badin, ensemble et l’un pour le tout, à la quantité de quatre septiers de bled mouture, à la mesure du dit lieu, et deux poulets, le tout payable au jour et feste de saint Rémy par an. »

En 1484, Dourdan fut retiré par Charles VIII des mains du sieur de Gobaches, et pendant trente ans demeura réuni à la couronne. Mais en 1513, au milieu des guerres étrangères qui ruinaient alors la France, Louis XII, se trouvant dans de grands embarras de finances pour l’entretien de ses troupes, aliéna une partie de son domaine, et moyennant 80,000 livres (320,000 fr. environ), engagea Dourdan, avec Melun et Corbeil, à Louis Malet de Graville.

Cet illustre personnage, seigneur de Montagu, Marcoussis et Bois-Malesherbes, chambellan et conseiller du roi Louis XI, amiral de France, gouverneur de Picardie et de Normandie, grand veneur du roi Louis XII, d’une antique famille normande qui prétendait remonter au temps de Jules César et « avoir été sire en Graville premier que roy en France, » possédait déjà, par son alliance avec les de Montagu, beaucoup de fonds de terre dans la châtellenie de Dourdan. Riche et puissant, il fut le bienfaiteur de Marcoussis. Il n’oublia pas Dourdan. Une tradition, qui était encore vivante du temps de de Lescornay, lui attribue la reconstruction des tours, clochers et voûte de l’église Saint-Germain, détruits en 1428 par Salisbury. Ce qu’il y a de certain, c’est que sur la première clef de cette voûte étaient gravées les armes du pape ; sur la seconde, celles du roi, et sur la troisième, celles de l’amiral de Graville, qui sont : de gueules à trois fermaux d’or. Le style de plusieurs décorations fines et délicates exécutées à l’intérieur et à l’extérieur de l’église, principalement au portail de la place, porte l’empreinte de cette époque.

Un très-curieux codicille, trouvé en 1515, après la mort de ce seigneur, et précisément daté de 1513, année de l’achat de Dourdan, mérite ici quelques détails. Nous devons avouer à nos lecteurs que le sire Louis Malet de Graville passe pour avoir été un personnage assez rapace et très-soigneux de ses intérêts pécuniaires. L’acte de générosité qu’on va lire a semblé à quelques auteurs une sorte de restitution, un honorable et dernier scrupule.

Considérant d’abord que pendant fort longtemps il a eu « gros estat, grosses pensions, grands dons et profits de la chose publique, en quoy a été ladite chose publique chargée ; » considérant ensuite les « urgens affaires » du royaume, pour lesquelles « le pauvre peuple est, de présent, fort grevé, comme chacun sçait, » Louis de Graville, « après y avoir pensé et repensé, » donne et lègue purement et simplement « à ladite chose publique » les quatre-vingt mille livres qu’il a versées entre les mains du roi, et pour lesquelles les seigneuries de Dourdan, Melun et Corbeil lui ont été hypothéquées. Il rend, après lui, sans aucune indem-