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DOURDAN SOUS LES COMTES D’ÉVREUX.

de Saint-Chéron ne pouvaient en rien les aider, l’abbaye étant elle-même dans de grands embarras. On était déjà loin des heures brillantes du xiiie siècle, où Saint-Chéron, entouré de la protection des papes, favorisé par les princes et les seigneurs, tenait un des premiers rangs parmi les abbayes du grand diocèse.

Avec la guerre était venue l’épreuve. Les habitants de Chartres avaient détruit la grosse tour de l’église du couvent, en 1357, dans la crainte que les Anglais n’en fissent une forteresse, et les malheurs de l’époque avaient porté un tel préjudice aux religieux placés entre les assiégés et les assiégeants, que la misère les avait obligés à vendre une partie de leurs propriétés rurales[1]. Heureusement, depuis cinquante ans, « plusieurs bonnes âmes avaient donné ou légué à Saint-Germain plusieurs terres, vignes, prés, cens, rentes et autres choses pour le salut et remède de leurs âmes, pour faire certains services et prières pour eux en ladite église. » Grâce uniquement à ces aumônes, le prieur et ses frères avaient pu « avoir leur substantation. » Mais ces biens nouvellement acquis étaient presque tous tenus du seigneur de Dourdan en fief ou censive, et il importait pour les degrever dans l’avenir d’obtenir amortissement.

Le prieur messire Robert Joudoin y parvint sans peine. Il avait la confiance et l’amitié du pieux et charitable comte Louis, qui « espérant et voulant être participant ès-prières et oraisons qui seront faictes en icelle église, comme vrai fondeur, » donna en son châtel de Dourdan, au mois d’avril 1381, des lettres générales d’amortissement et confirma celles de son père Charles d’Évreux, spécialement le don fait alors par feu Gilles Braules, écuyer, pour lors sire de Roullon, de seize sols parisis de rente, pour certains services en l’église Saint-Germain.

Bien plus, par un titre spécial (daté de Dourdan, mai 1373), Louis octroya au prieur et à ses frères leur chauffage de bois mort en sa forêt de Dourdan, tout le bois nécessaire aux constructions du prieuré, et le droit de faire paître chaque année vingt porcs dans la forêt, suivant les termes et époques accoutumés.

Les motifs dont il était animé, le pieux seigneur nous les donne en commençant : « Pour ce que nous avons singulière dévotion et parfaicte affection à l’église Saint-Germain de Dourdan, en laquelle nous receusmes le saint sacrement de baptesme et en laquelle ont esté faicts plusieurs anniversaires pour nos prédécesseurs et plusieurs services et oraisons pour nous. » En échange de ces dons, le prieur et ses frères s’engageaient à faire participer Louis à toutes les messes, oraisons et bien faicts de l’église et à célébrer chaque année à son intention une messe du Saint-Esprit durant sa vie et de requiem après sa mort[2].

Quand on ouvre le testament fait l’année qui précéda cette mort (1399)

  1. Acte de l’abbé Robert (c. 1380) ; Titres de Saint-Chéron ; arch. départ.
  2. De Lescornay, p. 90.