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PROMENADE DANS LES DEUX CANTONS DE DOURDAN.

fouler le drap et dont la fontaine est célèbre par la constance de sa source qui fait tourner jour et nuit une des meules du moulin, par la limpidité de ses eaux qui passent pour minérales, par la fraîcheur et le pittoresque de son site que les lavoirs modernes ont, hélas ! bien dépoétisé, par le souvenir de Lamoignon qui en faisait une de ses excursions favorites, par les vers de Boileau qui l’a chantée sous le nom de « Polycrène » et par l’ambitieuse inscription :

LAMONIANA FORTVNA HUNC
FONTEM INVENIT QUI PERENNEM
AQVAM PERENNITATI
DEDIT DAT DABIT.

Ici, nous nous éloignons un peu du cours de l’Orge, et, laissant le chemin de fer s’arrêter au bas du versant et continuer à mi-côte sa route vers Paris, nous nous élevons sur la gauche pour gagner Saint-Chéron. Toutefois, avant de quitter le fond de la vallée, signalons le hameau de Saint-Évroult qui mérite l’attention de l’antiquaire par sa station romaine et son ancien prieuré[1], et les fiefs de la Petite-Beauce, Mirgaudon, etc.

La montée de Saint-Chéron est rapide. À mesure qu’on s’élève, la vue embrasse un panorama justement renommé. La vallée s’est élargie, le paysage a pris un aspect grandiose. Des pentes sauvages, des crêtes élevées se dressent en face, au-dessus du vallon verdoyant, et, au bout d’un immense défilé, l’horizon s’ouvre et l’œil se perd dans d’harmonieux lointains. Dominant Saint-Chéron de leur double sommet, les buttes Saint-Nicolas avec leur sombre panache d’arbres verts, sont les géants de la contrée. Leur vigoureuse silhouette se découvre de fort loin et, dans tous les points de vue des environs, tranche sur les lignes indécises et les molles ondulations des coteaux voisins. Aussi Saint-Chéron s’appelle-t-il Saint-Chéron-Montcouronne ou mont-couronné et se distingue-t-il ainsi de ses homonymes de la Beauce, Saint-Chéron-lès-Chartres, Saint-Chéron-du-Chemin, en revendiquant un privilége presque unique dans la région, celui de posséder une montagne.

Donnons-nous le plaisir d’admirer ici une de ces échappées de grande et belle nature que nous retrouverons rarement dans notre pérégrination à travers les fertiles vallons du Hurepoix ou les plaines sans limites de la Beauce. Sans doute la nature est belle partout : ceux qui l’aiment le savent bien ; les pittoresques horizons ne sauraient faire mépriser les charmes des horizons prochains ni même ceux des horizons déserts : mais on est toujours heureux de rencontrer ces tableaux complets où détails, plans et perspectives ont été, pour ainsi dire, savamment ménagés. Ainsi pensent les touristes et les peintres qui viennent exprès de Paris

  1. Voir archives de Seine-et-Oise, Clairefontaine et St-Rémy des Landes.