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L’HÔTEL-DIEU

Ici, sans doute sous l’influence de la reine-mère Marie de Médicis, qui devient dame de Dourdan en 1612, le régime de l’Hôtel-Dieu change complétement, et les habitants, dépossédés de leur initiative, voient leur hospice confié à la direction d’une femme et converti en un bénéfice à la nomination du grand aumônier de France. Dès le 12 mai 1614, sœur Estiennette Matharel, religieuse de l’ordre de Cîteaux, est commise par le cardinal du Perron « au régime et gouuernement de l’Hostel-Dieu et à la charge de Mère et Maitresse » avec son logis et la pension nécessaire[1].

Il ne faut pas que nos lecteurs aient une fausse idée de ce que pouvait être alors l’Hôtel-Dieu de Dourdan et se figurent un établissement régulier offrant de grandes ressources. Ils se méprendraient. Comme son nom l’indique, un hospice n’était alors qu’un refuge, un asile, un gîte où les pauvres passants, les voyageurs malades, les mendiants tombés sur la route trouvaient une paillasse et un morceau de pain. Il était rare que les malades de la ville y fussent transportés, car la piété et la charité des voisins pourvoyaient aux besoins des plus pauvres. L’Hôtel-Dieu de Dourdan paraît avoir été très-anciennement installé sur l’emplacement de l’antique paroisse Saint-Jean, rue Saint-Pierre, presque en face des halles[2]. Un corps de logis sur la rue, une chapelle où « l’eau tomboit sur l’autel » en 1618, une cour, un vieux bâtiment derrière et un petit terrain en formaient toute la contenance. De pieuses femmes s’y dévouaient au service des malheureux, elles y couchaient les passants sur de la paille, leur donnaient à manger et, avec les très-modiques revenus de la maison, avec les aumônes qu’elles recueillaient à domicile, elles préparaient des soupes et des bouillons qu’elles portaient « dans leurs pots » aux plus indigents de la ville. Dans des temps d’épidémie et de guerre, où de nombreux malades, des soldats blessés ou traînards, des paysans errants et ruinés encombraient Dourdan, on avait vu les pauvres gardes-malades obtenir l’entrée du château et convertir en ambulances les salles délabrées ou abandonnées.

La charge de mère et maîtresse de l’Hôtel-Dieu de Dourdan n’avait rien de bien avantageux ; aussi voyons-nous la sœur Matharel s’en démettre dès 1618, et la sœur Marie du Moulin, religieuse professe de Saint-Augustin, recevoir à sa place un bénéfice qui, tout modeste qu’il est, est confirmé par lettres-patentes du souverain. C’est à cette occasion que Louis XIII déclare la royale origine de l’Hôtel-Dieu de Dourdan, et, dans son conseil privé, donne gain de cause au chapelain qui réclame ses 75 livres de traitement.

Après la sœur du Moulin et la sœur Élisabeth de Montorné, de l’ordre de Cîteaux, Jeanne de Buade de Frontenac, personne de qualité, est

  1. A. 1. 5.
  2. On n’a aucune donnée sur cette paroisse.