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CHAP. IV. — TOULOUSE

Mon naturel est d’apprendre toujours ;
Mais si ce vient que je passe aucuns jours
Sans rien apprendre en quelque lieu ou place
Incontinent il faut que je déplace.

Aussi, se conformant aux désirs de son illustre ami, il mit de côté, non sans quelque regret, ses travaux littéraires et, au commencement de l’année 1532, il entra comme étudiant à l’université de Toulouse. C’était alors la plus célèbre école de droit de France, elle jouissait d’une si grande réputation à l’étranger qu’on y trouvait un nombre considérable d’étudiants des autres nations, des Espagnols, des Allemands des Anglais. Les deux années que Dolet passa à Toulouse sont parmi les plus importantes de sa vie. C’est là que se préparèrent tous ses malheurs futurs et qu’il suscita ces inimitiés qui le poursuivirent jusqu’au jour où il fut brûlé sur la place Maubert ; c’est là aussi qu’il se lia avec d’excellents amis qui ne l’abandonnèrent jamais. Nous avons le bonheur d’être mieux renseigné sur ces deux années passées à Toulouse que sur aucune autre période de la vie de Dolet. Ses Orationes duœ in Tholosam et les trois livres de lettres, qui font partie de ce même volume, sont nos principales sources d’information ; mais nous avons encore les histoires de Toulouse, les vies des autres hommes distingués, qui étaient alors dans cette ville, et la correspondance de Jules-César Scaliger avec Arnoul Le Ferron pour compléter nos renseignements.

De Padoue à Toulouse la distance morale était encore plus grande que la distance géographique. La première de ces villes était le refuge de la liberté de penser, aucune barrière n’y venait entraver les spéculations des savants, les plus profonds problèmes intellectuels étaient discutés par eux avec une franchise qui, si elle conduisait parfois à des conclusions peu raisonnables, n’en montrait pas moins une grande abondance de vie et de vigueur, et à Padoue la culture littéraire était portée au plus haut point et n’était pas moins à l’ordre du